Veiller sur elle. J-B Andrea

Veiller sur elle par Andrea

Pourquoi ce roman a t-il remporté le Prix Goncourt ? D’après la lectrice, parce qu’il possède des qualités littéraires, en abondance. Jean-Baptiste Andrea nous emmène en voyage, retrace l’histoire d’un destin, celui d’un garçon italien pauvre, souffrant de nanisme. A la fin de sa vie, dans l’obscurité d’une abbaye, Mimo revient sur son incroyable parcours. Malmené et maltraité par sa famille et ses patrons, notre narrateur va pourtant devenir un grand sculpteur au cours de la première partie du XXème siècle. Au fil des pages de ce roman lumineux, Mimo se révèle à la fois attachant et bouleversant. A l’adolescence, et dans de mystérieuses conditions, il rencontre Viola Orsini, une adolescente issue d’une famille riche et puissante. Rien ne pouvait rassembler ces deux êtres. Pourtant, ils vont se lier d’une profonde et indéfectible amitié tout au long de leur vie. Rebelle, inventive et audacieuse, Viola va tout faire pour échapper à sa condition de femme. La Seconde Guerre mondiale et la montée du fascisme, en Italie, seront des temps forts dans leur relation. Grâce à son talent, Mimo sculpte de nombreuses œuvres dont une énigmatique et magnifique Pietà qui bouleverse le public au point d’être enlevée par le Vatican. Influencé par la beauté et l’Art, Jean-Baptiste Andrea excelle dans sa façon de raconter, de toucher la lectrice en visant le cœur. Ses personnages sont forts au point de continuer à vivre après la lecture de ce roman profond et lumineux. Prix Fnac. Prix Goncourt.

Triste tigre. N. Sinno

Triste tigre par Sinno

En France, 160.000 enfants sont agressés sexuellement, chaque année. Dans 81% des cas, ces violences se déroulent dans le milieu familial. Huit victimes sur dix sont de sexe féminin. Neige Sinno a été violée par son beau père, de l’âge de sept ans à ses quatorze ans. Après un procès où il a été condamné, la jeune femme a rédigé ce bouleversant témoignage. Mais elle prévient d’emblée qu’elle n’est pas sauvée et que son écriture n’est pas thérapeutique. Indispensable, son récit contribue largement à lever le voile sur cet insoutenable tabou de notre société. Au fil des pages, la lectrice découvre une fine analyse du mécanisme des violences sexuelles intrafamiliales. La richesse de ce récit repose notamment sur de nombreuses références littéraires : Nabokov, Toni Morrison Virginie Despentes ou Christine Angot. Le titre fait allusion à l’ouvrage américain « Tiger Tiger » de Margaux Fragoso qui raconte les viols d’une enfant par un pervers. Neige Sinno signe, ici, une confession poignante, intelligente et nécessaire ; une réflexion sur le mal. Excellent moment de lecture. Prix Femina. Prix Goncourt des Lycéens. Prix littéraire du Monde. Prix des Inrockuptibles 23.

La végandelle. L. Bayer

La végandelle par Bayer

Frustrée par le format court des nouvelles, j’ai longtemps préféré lire des romans. Pourtant, après avoir découvert ce recueil, je dois avouer que ces courtes fictions se lisent bel et bien comme un roman. En maîtrisant parfaitement cet exercice de style, Laurent Bayer nous présente une série de personnages et de situations folkloriques. Des caves du palais de justice aux égarements d’Antoine en passant par les soupers de la noblesse belge, l’auteur capte l’attention de la lectrice en la plongeant dans l’univers de sa ville natale, Bruxelles. Inspiré, Laurent Bayer ne manque ni d’imagination ni d’humour. La chute de l’histoire est souvent inattendue et produit son effet. Pour les plus curieux, la signification du titre « la végandelle » se dévoile à la fin de ce recueil de nouvelles qui donne la frite, en ces temps moroses ! Excellent moment de lecture.

Avoir un corps. B. Giraud

Avoir un corps par Giraud

En 2022, Brigitte Giraud a remporté le Prix Goncourt pour son bouleversant récit autobiographique : « Vivre vite ». Curieuse de découvrir un autre livre de cette auteure, j’ai choisi un roman publié en 2013 : « Avoir un corps ». Dans un long monologue, la narratrice décrit son rapport au corps depuis la petite enfance jusqu’à l’âge adulte en passant par l’avortement, la maternité et le deuil. Au plus près de sa vérité, Brigitte Giraud nous décrit les premières fois d’une femme, de la joie à la douleur, en cinq parties. Au fil des pages, il est question d’un corps qui bouge et évolue ; un langage. Avec talent et dans un style pudique et délicat, l’écrivaine retrace cette touchante expérience, à la fois singulière et féminine. Excellent moment de lecture.

Tant que le café est encore chaud. T. Kawaguchi

Tant que le café est encore chaud par Kawaguchi

Le succès de cette fiction « feel-good » interpelle. Pourquoi ce roman est-il dans la liste des best seller internationaux ? Voici le pitch : à Tokyo, il existe un café où il est possible de voyager dans le temps en s’asseyant sur une chaise et en suivant certaines règles. Mais l’opportunité ne dure que « tant que le café est chaud ». Au fil des pages, la lectrice suit l’expérience de quatre femmes japonaises qui, tour à tour, vont s’asseoir sur la fameuse chaise de café. Il faut avouer que le début de la lecture est pénible car les deux premiers témoignages sont futiles, caricaturaux et beaucoup trop longs. En poursuivant la lecture, l’histoire du décès de Kumi et de sa sœur chagrinée se révèle bouleversante. Finalement, ce petit livre fantastique rencontre le succès car il traite de thèmes universels comme la mémoire, l’amour et le pardon au pays du Soleil Levant et de ses traditions singulières. Un roman léger, sage et poétique, à lire au cours d’un voyage ! Bon moment de lecture.

Le Pavillon d’Or. Y. Mishima

Le Pavillon d'or

Le Pavillon d’Or est une merveille architecturale du temple Rokuonji, à Kyoto. A partir d’un fait divers, Yukio Mishima romance la vraie histoire d’un bonze (Mizoguchi) qui mit le feu au Pavillon d’Or, en juillet 1950. Bègue au crâne rasé, Mizoguchi est également le narrateur du roman. Avant de plonger dans la fiction, la lectrice vous conseille de passer la longue préface qui oriente trop la lecture. Dès les premières pages, Mizoguchi revient sur son parcours personnel et son intérêt pour le Pavillon d’Or. En devenant bonze, il s’immerge dans la quiétude d’un monastère bouddhique zen, une vie communautaire qui n’échappe pourtant pas à l’hypocrisie, la haine et la trahison. A travers cette fiction, l’auteur montre à quel point, après Hiroshima et la guerre, la foi de la jeunesse est malmenée. Obsédé par la beauté d’une jeune fille décédée, Mizoguchi va mettre en place un mécanisme de déviation étroitement lié à l’énigme de la beauté et au fameux « Pavillon d’Or ». A travers son héros, l’auteur traite brillamment du thème intemporel de la beauté dans un style métaphorique singulier. Au fil de la lecture, les mots se transforment en images poétiques, idéales et typiques du pays du Soleil levant. Pourquoi Mizoguchi va t-il brûler le temple ? Pareil à un koan japonais, chacun interprètera ce récit à sa façon. Bon moment de lecture. 

La petite menteuse. P. Robert-Diard

La petite menteuse par Robert-Diard

Actuellement en salle, deux excellents films français font la part belle à des procès : « Anatomie d’une chute » (Justine Triet) et « Le Procès Goldman » (Cédric Khan). En littérature, « La petite menteuse » décrit le procès en appel d’un homme accusé de viol par Lisa, 15 ans. En première instance, Marco Lange a été condamné à dix ans de réclusion. En position de victime, Lisa avoue finalement son mensonge à sa nouvelle avocate. Lors du procès en appel, Alice Kéridreux va plaider la cause de Lisa devant des jurés effarés. L’enjeux du roman est bien de faire aimer cette petite menteuse malgré la complexité du dossier. Par la voix d’Alice, Pascale Robert-Diard essaie de comprendre pourquoi des adultes, bien intentionnés, ont gobé tout cru le mensonge de l’adolescente. Efficace et bien rythmée, cette brillante fiction plonge la lectrice dans le monde de la juridiction pénale en interpellant tout au long de la lecture. Chroniqueuse judicaire au journal « Le Monde » , Pascale Robert-Diard était particulièrement bien placée pour écrire ce roman puissant. Excellente lecture. Prix Goncourt des Lycéens.

L’atelier d’écriture. N. David-Weill

L'atelier d'écriture par David-Weill

Romancière, Natalie David-Weill a notamment dirigé un atelier d’écriture à Bruxelles. Dans ce dernier roman, elle nous plonge précisément au cœur d’un stage d’écriture. La narratrice s’appelle Esther, célibataire, influenceuse et auteure d’un livre de recettes. A la suite d’une rupture, elle décide de suivre son amie Niki dans son désir d’écriture. Autour d’une table, les deux complices rencontrent cinq autres participants, des hommes et des femmes qui cherchent à parfaire leur technique littéraire. Certains personnages sont attachants, à l’instar de Georges qui traîne son chagrin et écrit des textes pour échapper à l’oubli de sa femme défunte. Dubitative au cours des premières séances, Esther va participer de plus en plus activement à cet atelier hebdomadaire, animé par un certain Stéphane. En s’appuyant sur de nombreuses références littéraires, Natalie David-Weill en profite pour distiller, au fil du récit, de judicieux conseils d’écriture. Bon moment de lecture.  

Le dimanche des mères. G. Swift

Le dimanche des mères par Swift

Ce livre vient d’être adapté au cinéma sous le titre « Entre les lignes » . L’univers de ce roman anglais est semblable à l’atmosphère de « Dowton abbey » car Graham Swift y dépeint subtilement la vie de familles aristocratiques et celle de leurs domestiques, au début du XXème siècle. Traditionnellement, en Angleterre, le dimanche des mères correspond à un jour de congé. Au service de la famille Niven, Jane Fairchild est une orpheline qui se passionne, à ses heures perdues, pour la littérature. En secret, la jeune domestique choisit de passer son dimanche dans les bras de Paul Sherigham, un fils de bonne famille avec lequel elle entretient une liaison. Dans le manoir de Paul, sensualité, grâce et romantisme sont au programme. Mais ce dimanche sera leur dernier rendez-vous car Paul doit bientôt épouser une héritière de sa condition. Pourtant, un imprévu va venir tout perturber. Avec talent, Graham Swift nous fait découvrir les sentiments des deux amants à travers le regard de Jane, à la fin de sa vie. Au fil des pages, Graham Swift dévoile talentueusement la passion dévorante de Jane pour la littérature et son destin singulier.  Bon moment de lecture.

Celle qui est revenue. D. Di Pietrantonio

Celle qui est revenue par Di Pietrantonio

Si vous cherchez une lecture singulière, publiée en édition « Livre de Poche », voici le troisième roman de Donatella Di Pietrantonio. L’auteure nous plonge dans une fiction qui se déroule en Italie, dans les années 70. Après avoir passé une enfance tranquille et bourgeoise, une adolescente découvre qu’elle a été adoptée. Enfant unique, elle est finalement rendue à ses parents biologiques et perd ses repères. L’adolescente vit mal cet abandon et peine à s’adapter à sa famille biologique, nombreuse, pauvre et sans états d’âme. Grâce à sa sœur, Adriana, l’héroïne va finalement réussir à s’adapter à son nouveau milieu. Loin des mensonges et des secrets familiaux, « celle qui est revenue » découvre l’amitié et l’amour filial. Ce récit d’apprentissage bouleverse et rappelle l’univers de la tétralogie d’Elena Ferrante « Une amie prodigieuse ». Bon moment de lecture. Prix Campiello 2017.

Les douleurs fantômes. M. Da Costa

Les douleurs fantômes par Da Costa

J’ai découvert tardivement Mélissa Da Costa à travers son joli roman « Les lendemains ». Malheureusement, son dernier roman « Les douleurs fantômes » ne m’a pas autant enthousiasmé. Pourtant, il faut reconnaître le talent et l’imagination de cette auteure française ; elle sait raconter des histoires même si celle-ci est trop longue. Ambre est le personnage principal de la fiction. La jeune femme n’a plus donné signe de vie à son groupe d’amis depuis sa rupture avec Tim. Un jour, Rosalie contacte Ambre suite à l’absence prolongée de son mari Gabriel. Cinq ans après leur dernière conversation, Ambre rejoint son amie Rosalie pour la consoler. De retour dans la ville d’Arvieux, Ambre revoit son ex petit ami, Tim, en couple avec un certain Anton. Evidemment, les souvenirs rejaillissent et la vie d’Ambre se retrouve chamboulée. Bon moment de lecture.

Archie. A. Cardyn

Archie par Cardyn

Ce petit roman plaira aux lecteurs et lectrices les plus sensibles car il y est question de résilience. Notre narrateur s’appelle Archie, un garçon né d’une mère toxicomane et d’un père absent. Placé en institution, Archie écrit des poèmes à sa mère et cherche à la revoir au moment de l’adolescence. Assoiffé de liberté, Archie va ensuite faire sa valise et quitter l’institution pour marcher sur le sentier des douaniers en Bretagne. Après des centaines de kilomètres, il espère rejoindre une école démocratique ; un pas vers sa liberté. Mais au moment de sa naissance, une sage-femme nommée Madeleine avait veillé sur son berceau. Tout en marchant sur le sentier face à la mer, Archie découvre les carnets de Madeleine ; ses confidences et ses secrets. La plume d’Alia Cardyn est à la fois poétique et émouvante. En nous racontant l’histoire d’Archie, cette auteure belge déploie une palette d’émotions dont certaines touchent au cœur. Bon moment de lecture.

Long week-end. J. Maynard

Résultat d’image pour Long weekend Joyce Maynard. Taille: 119 x 185. Source: www.amazon.fr

Joyce Maynard est une auteure américaine à succès. La lecture de son best-seller « Là où vivaient les gens heureux » ne m’avait pas fait grand effet. Sur les conseils d’une amie, j’ai ensuite acheté un autre roman de la même auteure : « Long week-end ». Cette fois, nous sommes sur la côte Est des Etats-Unis ; l’été 87. A quelques jours de la rentrée scolaire, un garçon et sa mère font des courses. L’adolescent est le narrateur du roman et se prénomme Henry. Dans un rayon de supermarché, Henry rencontre Frank qui lui demande de l’aide car il est blessé. En réalité, Frank vient de s’évader de prison et il va passer le long week-end du Labor Day chez Henry qui habite avec sa mère, Adèle. Joyce Maynard a eu la bonne idée d’écrire cette fiction du point de vue d’Henry car cela procure une certaine fraicheur au roman. Pour notre plaisir de lecture, l’adolescent de treize ans livre ses sentiments et toutes ses émotions. Il aborde plusieurs thèmes dont le divorce de ses parents, ses premiers émois et son amour pour Adèle, cette mère fragile et instable. Pendant six jours, Frank, Henry et Adèle vont vivre un singulier huis clos ; une expérience inoubliable. Excellent moment de lecture.

Le mystère de la femme sans tête. M. Leroy

Le Mystère de la femme sans tête par Leroy

Voici une fiction perturbante. L’auteure belge, Myriam Leroy, retrace la terrible histoire de Marina Chafroff, une femme russe qui vivait en Belgique pendant la Seconde Guerre mondiale. C’est en se promenant au cimetière d’Ixelles que l’auteure découvre la tombe d’une jeune femme. Lorsqu’elle se penche sur la pierre de granit sombre, c’est le mot « décapitée » qui la bouleverse totalement. Sur internet, le visage lumineux de cette « femme sans tête » lui apparaît. Obsédée par Marina, l’auteure décide alors de retracer sa vie pour mieux comprendre son terrible destin ; Marina s’est dénoncée suite à un attentat rue Marnix, en 1941. Dès le début de son enquête, Myriam Leroy bute sur le doute : comment une si petite femme a t-elle pu attaquer un soldat nazi ? « Le mystère de la femme sans tête » plane tout au long de la lecture. Ce livre a pourtant le mérite de nous rappeler une histoire oubliée, celle d’une femme qui s’est sacrifiée pendant la guerre, à Bruxelles. D’après la lectrice, Myriam Leroy va trop loin lorsqu’elle nous parle de la famille toute entière de Marina. De plus, les allers-retours dans le temps pèsent au cours de la lecture. Finalement, même si le sujet chamboule la lectrice, la fiction est loin de convaincre.

Les lendemains. M. Da Costa

Les lendemains par Da Costa

Grâce à une amie, j’ai découvert le deuxième roman de Mélissa Da Costa. Dès les premières pages, cette auteure française nous happe en nous coupant le souffle. Amande est l’héroïne de ce roman singulier et bouleversant. Suite au décès inopiné de son mari et de son bébé, la jeune femme s’isole dans une maison en Auvergne, au milieu de la nature. Au plus mal, Amande ne voit pas la vie s’épanouir au jardin et rejette le chat qui rôde autour de la maison. Mais un jour, intriguée par des annotations de l’ancienne propriétaire, Amande tente de redonner vie au potager et reproduit même quelques recettes. Lorsque la fille de l’ancienne propriétaire récupère des affaires dans la maison, Amande se lie d’amitié avec Julie. Sans le savoir, Julie va contribuer à sa reconstruction en aidant Amande à se projeter dans un futur. Si, chez mon libraire, j’ai trouvé le roman de Mélissa Da Costa classé dans la catégorie « feel good », je tiens à préciser que cette fiction n’est pas légère. Au contraire, véritable hymne à la renaissance et à la nature, ce roman captive et interpelle la lectrice jusqu’à la dernière page. Excellent moment de lecture.

Guetter l’aurore. J. Printzac

Guetter l'aurore par Printzac

Ce roman nous replonge dans la période sombre de la Seconde Guerre Mondiale, en France. Tout commence en 2022, lorsque Deborah rentre vivre chez sa mère, après une rupture amoureuse. Dans la maison, Esther, la grand-mère de Deborah, séjourne également. Cette dernière perd de plus en plus souvent la tête, confond sa petite-fille avec une certaine Clara. Qui est Clara ? Intriguée, Deborah se décide à en savoir plus à propos du passé de sa famille juive. Quel a été le parcours de la famille Brodsky, réfugiée au pied des Pyrénées, pendant la guerre ? Deborah repart sur les traces de ses proches, découvre la grande maison délabrée de Saint-Girons et des lambeaux d’histoire. Adolescente, Esther était la fiancée de Marius. Qu’est-il devenu ? Finalement, Clara était la meilleure amie d’Esther. Rebelle, la jeune fille s’était engagée dans un mouvement de Résistance. Malheureusement, des collabos semaient la terreur à Saint-Girons. Avec force, Julie Printzac évoque la jeunesse et les convictions de ces français, prêts à sa battre pour leur pays. Entre fiction et documentaire, Julie Printzac restitue une histoire familiale bouleversante ; une histoire qu’elle porte en elle. Bon moment de lecture.

L’énigme de la stuga. C. Grebe

L'énigme de la Stuga par Grebe

Camilla Grebe est une écrivaine suédoise qui a déjà connu le succès grâce à plusieurs de ses livres : « Un cri sous la glace », « L’ombre de la baleine », « L’archipel des larmes » et « Le journal de ma disparition ». Douée et perspicace, Camilla Grebe nous entraîne, ici, dans un thriller familial long mais efficace. Gabriel, le père de famille, est un écrivain reconnu en Suède. Editrice, Lykke est son épouse et la mère de jumeaux adolescents (Harry et David).  A l’occasion de la fête de l’écrevisse, la petite famille décide d’organiser un dîner dans leur jolie maison suédoise. Parmi les invités, Bonnie est l’amie d’enfance des jumeaux. Au bord du lac, les adolescents s’amusent jusqu’à tard dans la nuit. Au petit matin, Lykke est réveillée par la musique qui résonne encore dans la stuga ; la cabane où dorment les trois adolescents. Mais lorsqu’elle arrive à pénétrer dans la stuga, elle découvre une scène de crime où repose le corps sans vie de Bonnie. A part les jumeaux, qui avait accès à la stuga ? Le cauchemar commence pour la famille mais Lykke va tout entreprendre pour reprendre sa vie en main. Inspirée par « Le mystère à huis clos », Camilla Grebe construit, avec brio, son thriller ponctué d’allers-retours dans le temps. Sang et encre se mélangent dans cette fiction singulière où le monde de l’édition sert de décor. Bon moment de lecture. Grand Prix des Lectrices du « Elle ».

Fuir l’Eden. O. Dorchamps

Fuir l'Eden par Olivier Dorchamps

Sur les conseils de ma libraire, j’ai découvert ce roman singulier qui offre une palette d’émotions. La couverture du livre représente L’Eden, une cité brutaliste de la banlieue de Londres où règne la violence. Dans cette barre d’immeuble en béton, Adam vit avec ses parents et sa petite sœur, Lauren. Le père, surnommé « l’autre » par Adam, frappe allègrement la mère de famille. Un jour, la mère disparaît en laissant, derrière elle, une lettre. D’après « l’autre », elle serait partie en Espagne avec son amant, abandonnant le foyer. Adam et Lauren encaissent, survivent dans la cité en compagnie de ce père alcoolique et brutal. Toujours à court d’argent, Adam fait la lecture à une dame aveugle qui lui sert de mère de substitution. Jusqu’au jour où Adam sauve de justesse une jeune fille sur le quai de l’express. Alors, l’amour devient une quête pour Adam, un adolescent fragile, sensible et attachant. Auteur franco-britannique, Olivier Dorchamps nous embarque totalement dans ce roman social. Son univers singulier accapare l’attention de la lectrice qui retrouve le style de Bruno Masi et la misère sociale des films de Ken Loach. Au fil de cette fiction contemporaine, l’espoir surgit parfois entre les lignes.  Excellent moment de lecture. Prix des lecteurs de la Maison du Livre. Prix Louis-Guilloux.

Joseph Kessel. Y. Courrière

Joseph Kessel par Courrière

Cette biographie mythique est à nouveau disponible en librairie. Ami et confident du grand écrivain, Yves Courrière y décrit l’itinéraire compliqué de Joseph Kessel, né dans une famille juive russe. Au début du XXème siècle, la famille de Joseph s’installe en France, à Nice puis à Paris. Au cours de son enfance, le futur écrivain se passionne pour un grand roman français : « Les trois Mousquetaires ». Adolescent, Joseph se fait appeler « Jef » et arpente les rues d’un Paris qui éveille sa curiosité. Elève à la Sorbonne, il s’affirme comme acteur de théâtre et auteur au moment où le premier conflit mondial éclate. Une première œuvre littéraire, écrite à seize ans, révèle sa sensibilité d’écrivain. Mais en pleine guerre des Balkans, Joseph se passionne pour les grands reportages de presse. Trop jeune pour pouvoir s’engager, il devient brancardier dans un hôpital de guerre. Parmi les soldats blessés, Joseph découvre la souffrance, la mort mais aussi l’amour dans les bras d’une infirmière… En partant sur les traces du lion, Yves Courrière raconte la vie trépidante, riche et mouvementée de Joseph Kessel. Dans le détail, il retrace le parcours exceptionnel du romancier prodige au fil de l’histoire du XXème siècle. Bon moment de lecture.

Mon mari. M. Ventura

Mon mari par Ventura

Chaque lectrice retrouvera une part d’elle même dans ce premier roman très réussi. Amoureuse folle de son mari, la narratrice nous raconte sa vie quotidienne et son obsession pour son homme ; du lundi au dimanche. Depuis quinze ans, l’héroïne s’inquiète en permanence pour son mariage, vit dans l’angoisse d’une éventuelle séparation malgré un amour partagé. En cachette, elle accède à la messagerie de son époux, note dans un carnet les comportements suspects, ses réflexions et ses doutes. Pour notre plaisir de lecture, cette traductrice et mère de deux enfants, joue un rôle sans discontinuer. Inspirée par le sentiment amoureux, Maud Ventura s’amuse à caricaturer la dépendance féminine et la passion, à l’extrême. Jubilatoire, ce roman à suspense se lit avec délice. Excellent moment de lecture. Prix du premier roman.

Un été français. Ch. Moguérou

un été français par Moguerou

Christian Moguérou est né à La Rochelle, au cours de l’été 1968. Dans ce roman dense, il nous parle de cette haute saison où la plage grouille de monde, juste avant l’heure de l’apéro. Pieds nus dans sa cabane du Cap-Ferret, le journaliste dévore tant de livres qu’ils sont devenus des meubles à force d’exister. Face au Bassin, le voici qui écrit à propos de ses étés passés en France. Au fil des pages, l’auteur livre ses souvenirs d’enfance, évoque le vestige de ses amours et la trace de ses amis dans le sable en attendant la venue de Louise, Luigi et Gabriel. Erudit, l’auteur se réfère continuellement à la littérature, cite Henry Miller, Lawrence Durrell, Christian Bobin et tant d’autres. Artiste sensible, il fait aussi référence à de nombreux films et une bande-son singulière. A la fois inspiré et passionné, ce narrateur contemporain nous offre une réflexion sur ce que représente l’été français des juilletistes et des aoûtiens en s’appuyant sur sa propre définition. Pour la lectrice, ces mots baignés de soleil dégagent une certaine poésie. Au détour des phrases, elle imagine parfaitement une fin d’été face à ce Bassin qui hésite entre grisaille chinée et soleil timide. Le cœur entre deux rives, Christian Moguérou s’égare souvent au cours de son épopée estivale, laisse dérouler son imagination fertile pour notre plaisir de lecture. Amoureux des femmes et épicurien, il dévore la vie en espérant que l’été se souviendra de lui. Bon moment de lecture.

Le goût du crime. M. et E. Roux

Le goût du crime : Enquête sur l'attraction des affaires criminelles par Roux

Avez-vous le goût du crime ? Passionnés par les faits divers depuis l’adolescence, Emmanuel et Mathias Roux ont analysé le pouvoir d’attraction des affaires criminelles. Au cours de leur fascinante enquête, ils retracent, en détail, des affaires qui ont définitivement marqué l’opinion publique : le petit Grégory, Xavier Dupont de Ligonnès, Jonathan Daval, l’énigme de Chevaline, la disparition du docteur Godard etc…En se basant notamment sur les thèses de Roland Barthes, Emmanuel et Mathias Roux analysent le mécanisme du passage à l’acte en évoquant les troubles de la causalité. Un certain attachement à la vérité pousserait le grand public à s’intéresser à un crime pour essayer de le comprendre en reconstituant les causes ; donner du sens au mal. Existe-t-il un destin de criminel ? Dans cet ouvrage, les auteurs font l’autopsie d’une dizaine de grandes affaires non résolues, en rappelant les faits, l’enquête, les indices et en détaillant les grands moments du procès. Les auteurs abordent également la notion de mythe car, depuis le XIXème siècle, le crime a pris la suite du mythe. Grâce à l’essor de la presse et de ses rubriques consacrées aux faits divers, certaines affaires criminelles sont devenues une source d’influence créatrice (Stendhal, Flaubert, Giono…). En allant toujours plus loin dans l’analyse, les auteurs font le lien entre la figure du héros et celle du hors la loi, sorte d’antihéros. Finalement, les criminels interpelleraient nos consciences : sont-ils humains? Non humains ? Sont-ils des monstres ? Afin d’éclairer les passions que suscitent les affaires criminelles, Emmanuel et Mathias Roux puisent, avec brio, dans l’anthropologie, la philosophie, la psychanalyse et l’histoire. Bon moment de lecture.

La vie des plantes. E. Coccia

La vie des plantes par Coccia

Cet essai captivant a été publié en 2017 et nécessite une certaine concentration pour tout assimiler. Emanuele Coccia est un philosophe italien qui écrit en français. Etudiant dans un lycée agricole, le philosophe a longtemps étudié les plantes ; un monde végétal négligé par les hommes. Malgré les différences évidentes entre l’homme et la plante, le souffle les rassemble. En s’appuyant sur les études de nombreux biologistes, Emanuele Coccia défend sa thèse d’une métaphysique du mélange : grâce à l’occupation des plantes sur terre, les animaux et les hommes ont réussi à vivre dans l’atmosphère (pas seulement la terre) en respirant l’oxygène produit par les plantes ; le lieu du mélange. Au cours de sa réflexion, le philosophe détaille les caractéristiques des plantes : de la feuille à la racine en passant par la fleur. Comme Goethe l’avait déjà annoncé, la feuille est la partie la plus importante de la plante qui permet la photosynthèse. Ensuite, les racines représentent le cerveau des plantes. Elles sont à la fois terrestres et aériennes. Enfin, la fleur représente la raison et le sexe ; une semence qui est une force. Pour poursuivre l’existence, la fleur est l’organe qui s’ouvre au monde et donc au mélange. D’après le philosophe, la terre est un corps céleste, une partie du cosmos qui vit grâce à l’énergie du soleil. Pour lui, respirer signifie s’immerger dans le monde et faire émerger le monde par notre souffle. L’atmosphère est finalement le monde où tout dépend du reste ; un mélange universel.  Excellent moment de lecture. 

Métamorphoses. E. Coccia

Métamorphoses par Coccia

Emanuele Coccia est un brillant philosophe italien. Sa réflexion sur les Métamorphoses se nourrit des œuvres de biologistes dont Darwin. Publié pendant la pandémie de Covid-19, cet essai a résonné d’une manière particulière. Construit en courts chapitres, le livre part de la fascination d’Emanuele Coccia pour la métamorphose d’une chenille en papillon : deux êtres apparemment disparates. Pourtant, malgré leurs différences, la chenille et le papillon partagent bien une même vie. La vie est ce qui passe d’un monde à l’autre, ce qui nous anime tous. Toute espèce naît d’une métamorphose, la relation qui unit le vivant au minéral mais aussi les bactéries, virus, plantes et animaux ; un phénomène de continuité de l’espèce. L’exemple de la naissance vient magnifiquement illustrer sa théorie. Pendant neuf mois, l’enfant est le corps et le même souffle que sa mère. Donner naissance à un enfant, transforme notre expérience en potentiel d’un point de vue anatomique et culturel. Au fil de la lecture, Emanuele Coccia nous invite à regarder le rapport entre les individus, les espèces et Gaia, la terre ; suivre le vivant dans sa continuité. D’après le philosophe, nous sommes tous une même vie, la métamorphose de la chair infinie du monde. Bien qu’enrichissant, cet essai nécessite une certaine concentration afin d’en saisir tout le sens. Bon moment de lecture.

125 et des milliers. S. Barukh

125 et des milliers : 125 personnalités racontent 125 victimes de féminicides par Barukh

Au fil des pages de ce livre imposant, 125 personnalités racontent 125 féminicides : des femmes assassinées par un conjoint violent. En France, un féminicide a lieu tous les deux jours et demi soit 125 victimes par an. Dans le monde, une femme est tuée toutes les 11 minutes par un proche ; une pandémie de l’ombre. Afin de construire la trame du livre, l’écrivaine Sarah Barukh a retrouvé les familles de victimes pour récolter leurs précieux témoignages. Grâce à leur talent, 125 personnalités ont ensuite esquissé un portrait, tenté de donner un visage à chaque victime. Delphine Horvilleur, Julie Gayet, Andréa Bescond, Isabelle Carré, Leïla Slimani et d’autres célébrités ont accepté d’écrire des textes souvent déchirants, à propos de ces femmes si joyeuses, dévouées et généreuses avant leur mort. A travers ces textes, la lectrice imagine la vie de ces filles, de ces femmes, de ces mères. Elle ressent aussi la douleur, l’impossible deuil et la souffrance des familles. Il existe des points communs à ces féminicides dont le crime de possession. Le nombre de féminicides qui sont commis dans les territoires d’outre-mer est vraiment inquiétant. Sous emprise, Sarah Barukh a elle-même quitté un conjoint violent. Son parcours nous éclaire et nous permet de mieux comprendre les conditions de l’emprise. Au fil des pages, Sarah Barukh questionne des experts comme des avocats, des médecins, une philosophe mais aussi sa propre mère pour essayer de comprendre le mécanisme de l’emprise dans notre culture, la violence envers les femmes et les moyens qui sont mis en place dans notre société patriarcale. Grâce à l’aide d’une association, Sarah Barukh détaille comment et quand quitter un conjoint violent. Incontournable en ce qui concerne les féminicides, ce livre offre des pistes de compréhension et fait l’effet d’un miroir lorsque des femmes racontent le terrible destin d’autres femmes. Excellent moment de lecture.

Blizzard. M. Vingtras

Blizzard par Vingtras

Marie Vingtras a reçu une multitude de prix littéraires pour ce premier roman choral efficace. Nous sommes en Alaska, la tempête de neige se prépare. Benedict a allumé un feu dans la  cheminée, il est seul dans la maison qui craque et gémit. La femme qui s’occupe de son fils, Bess, est sortie avec le petit. Mais Bess a lâché sa main quelques instants et l’enfant a disparu dans le blizzard. L’alerte est vite donnée et les proches de Benedict se lancent à la recherche du garçon en raquettes et motoneige. Rapidement, une course contre la mort s’engage. Alors que le blizzard souffle, quatre personnages s’expriment à tour de rôle. Chacun dévoile son passé, sa vérité et quelques secrets. Le style de la fiction est incisif et maîtrisé. Les phrases sont courtes car l’auteure cherche d’abord à raconter. Puis, au fil de courts chapitres, le rythme s’accélère. Le suspens est pourtant maintenu jusqu’à la fin même si les éléments distillés, tout au long de l’intrigue, sont abondants. Ce huis clos à ciel ouvert se révèle digne d’un thriller nord-américain où les thèmes de la culpabilité et de la paternité émergent. Bon moment de lecture.

Cerveau et Nature. M. Le Van Quyen

Cerveau et nature

Directeur de recherche à l’Inserm, Michel Le Van Quyen a déjà publié des ouvrages qui traitent du cerveau. Le neuroscientifique s’interroge, ici, à propos de l’impact de la nature et de sa beauté sur le fonctionnement de notre cerveau. En effet, l’auteur démontre à quel point nous avons besoin de la beauté du monde, au sein d’environnements naturels différents, pour bénéficier d’une bonne santé mentale. Au moment des confinements, liés au Covid, l’auteur a mis en évidence le fait que les populations urbaines étaient plus souvent exposées aux troubles de l’humeur comme l’anxiété et la dépression. Pouvoir regarder un arbre ou un jardin depuis une fenêtre d’hôpital, augmenterait la rapidité de guérison. D’après l’auteur, la nature est une source continuelle de joie et de fascination ; une expérience polysensorielle (odeur, vision…) qui augmente notre immunité. Par sa beauté et son calme, le vivant a de nombreuses vertus dont le pouvoir d’accaparer notre attention en bloquant nos pensées négatives et les ruminations inutiles. Depuis quarante ans, les Japonais préconisent « les bains de forêt » car se promener dans les bois permet de lutter contre le stress, apaise notre cerveau et regénère notre corps grâce à des effets anti-inflammatoires. La vue et l’expérience de la mer nous permettent également de nous connecter au vivant. Ecouter les sons marins et flotter à la surface de l’eau relaxent notre cerveau en nous renvoyant à des souvenirs in utéro. Loin d’un simple décor, la nature réside au plus profond de nous. Sortons, il est encore temps d’en profiter ! Bon moment de lecture.

Le chemin de sel. R. Winn

Le chemin de sel

Il y a deux bonnes raisons d’acheter ce livre : passer un bon moment de lecture, façon « feel good », et contribuer au nouvel avenir de Raynor et Moth Winn. En effet, après avoir fait un mauvais investissement, ce couple de cinquantenaires gallois perd tous ses biens et la jolie maison où leurs deux enfants ont grandi. A la même période, Moth apprend qu’il est atteint d’une maladie incurable. Que faire ? Où aller ? Fusionnels, Raynor et Moth choisissent de ne pas devenir un fardeau pour leur famille. Ensemble, ils décident de parcourir plus de mille kilomètres sur le sentier côtier du sud de l’Angleterre, bordé de broussailles. Au moment d’enfiler les sacs à dos, le périple commence pour ce couple attachant de sans abri. Faire du camping sauvage n’est pas de tout repos car il faut parfois monter la tente alors que le vent souffle ou que la pluie tombe sur les falaises. Mais le paysage se révèle souvent magnifique à l’aube et la vue sur la mer réconfortante. Pour se nourrir, le couple fait systématiquement cuire des nouilles dans un petit réchaud, gère l’eau potable, recompte la monnaie avant de voler des barres chocolatées. Chaque jour, les amoureux fréquentent un commerce afin de bénéficier d’eau chaude gratuite pour leur thé. A chaque étape, Raynor constate la présence d’autres sans abri et partage ses opinions. Grâce à la plume poétique de Raynor, la lectrice suit ces éternels amoureux sur le chemin de sel, ce sentier où ils croisent d’autres promeneurs mais aussi toutes sortes d’animaux, papillons et oiseaux. En se confrontant au vivant, Raynor et Moth ressentent une palette d’émotions : la faim, la peur, le froid, la chaleur, le désespoir et quelques joies. Tout au long du récit, la lectrice est à leur côté, à la fois inquiète et compatissante. Heureusement, certaines rencontres vont changer leur destin. Miraculeusement, après des mois de marche sur cette terre rocailleuse, Moth va se sentir mieux. Quel est le réel pouvoir de la marche et de la nature ? Excellent moment de lecture. 

Corps de femmes, incarner son féminin.

Corps de femmes : Incarner son féminin par Bertrand-Luthereau

Stéphanie Honoré a eu la bonne idée d’assembler les témoignages de dix femmes et de deux hommes afin d’évoquer le corps féminin. Chacun, chacune, apporte une dimension nouvelle au corps de la femme, cet objet de désir, victime d’agressions. Au premier chapitre de ce livre choral, Lucie témoigne des nombreuses difficultés de la femme contemporaine, celle qui cherche sa place dans une société favorable aux hommes. Adepte de la médecine traditionnelle indienne, Emmanuelle évoque sa maternité et son corps multiple : corps berceau, corps coquille, corps de vie ; corps des miracles. Sage femme, Maï décrit l’incroyable force des femmes qui souffrent dans leur corps au moment et après l’accouchement. Puis, Maï livre sa propre expérience de la maternité. Après les attentats de Paris, Sophie témoigne de la peur qui a habité son corps mais également de sa souffrance corporelle liée à une forme d’endométriose. A la veille de la cinquantaine, Sophie lève le voile sur sa ménopause et ses nombreux effets. Sénologue, Dominique évoque les seins des femmes et le cancer qui touche cet élément singulier de l’anatomie féminine. D’autres témoignages évoquent encore ce corps poétique, résidence de nos émotions. Finalement, lever des tabous (ménopause, règles) et évoquer la féminité contribuent à libérer la parole. C’est, aux yeux de la lectrice, le grand mérite de ce livre. Bon moment de lecture.

Je suis née au son du violon. B. Flye Sainte Marie

Je suis née au son du violon : La vie de Camille Urso, première musicienne féministe. par Flye Sainte Marie

Cette biographie romancée nous invite à découvrir le portrait d’une violoniste française méconnue, pourtant célèbre au 19ème siècle : Camille Urso. Avec talent, Bénédicte Flye Sainte Marie nous raconte la vie de cette musicienne et sa brillante carrière aux Etats-Unis. Grâce à une riche documentation, la lectrice découvre les mœurs d’une époque, son univers musical et quelques artistes dont certains belges. Mais l’auteure a l’intelligence d’évoquer la condition des femmes et les nombreux obstacles rencontrés par Camille, à son époque. En choisissant le violon, la virtuose a fait face aux préjugés de certains hommes pour qui cet instrument était trop « viril ». Féministe et femme de caractère, la musicienne a ensuite mené un combat pour faire embaucher les femmes artistes dans les orchestres au même titre que les hommes. Finalement, grâce à ses convictions, Camille Urso a facilité l’accès à des générations de jeunes femmes aux Conservatoires et dans les écoles de musique. La lectrice se demande alors pourquoi Camille Urso a été si vite oubliée ? D’après l’auteure, la musicienne féministe a été victime de « mentrification », ce phénomène qui tend à rendre invisible les femmes à travers l’Histoire. Au fil de son ouvrage, Bénédicte Flye Sainte Marie redonne une place à la musicienne prodige, la sort de son anonymat pour notre plaisir de lecture. Avant de signer cette biographie, Bénédicte Flye Sainte Marie dénonce certains archaïsmes qui persistent dans le monde musical français (seulement 6% des chefs d’orchestre et un quart des solistes sont des femmes). Finalement, à la manière de Camille Urso, Bénédicte Flye Sainte Marie s’indigne, dénonce et mène son combat de féministe pour une meilleure parité.  Bon moment de lecture.