Après la parution des romans, « l’exception » et « l’embellie », il fallait absolument lire le premier roman d’Audur Ava Olafsdottir devenu, entretemps, un bestseller. Après lecture, je le trouve différent des deux autres romans car mieux écrit, plus abouti. En effet, ce livre est un trésor et offre aux lecteurs une palette d’émotions très variées. Arnljotur est un rouquin islandais de 22 ans, passionné d’horticulture, à la recherche de lui-même. Après la mort accidentelle de sa mère et le placement de son frère jumeau en institut, il se retrouve seul face à son père. Alors, ce jeune héros va se déraciner, comme ses boutures de rosiers, pour se reconstruire dans le jardin d’un monastère loin de l’Islande. Père d’un enfant non désiré, il suit son étoile, son lien à sa mère, sa rose pourpre à huit pétales: la rosa candida. Frère Thomas, un moine cinéphile, lui servira de guide spirituel lorsque l’imprévu surgit. La lectrice suit instinctivement cette histoire aux allures de conte moderne. Tout est plausible dans ce roman où il est question d’amour filial, de sentiments amoureux, de religion, de sexe, d’accident, de choix de vie… Le fait de ne pas nommer le pays où le narrateur part s’installer est, pour la lectrice, le seul bémol car ce manque de repères déroute. Le roman est, cependant, très réussi car il traite de thèmes actuels avec douceur et intelligence. Comme dans ses autres romans, l’auteure nous incite à nous poser les bonnes questions. Les notes poétiques et métaphoriques ajoutent une touche lumineuse à cette fiction initiatique. Excellent moment de lecture.
Archives mensuelles : mai 2014
Wiggins et le perroquet muet. B. Nicodème
Le ministère de l’Education nationale (France) a sélectionné ce petit roman policier pour nos enfants de 10 à 12 ans. Ceux ci apprécient l’intrigue de ce livre doté d’un lexique de vocabulaire et d’une carte géographique pour faciliter la compréhension. A Londres, en 1889, un jeune garçon pauvre offre ses services de détective à Sherlock Holmes car une jeune femme a été étranglée, deux jours après avoir reçu un joli perroquet empaillé. L’enquête commence. La manière dont l’auteure écrit ce livre social et réaliste, en se mettant à la hauteur des jeunes lecteurs, est remarquable. Une excellente invitation à découvrir un roman policier en édition jeunesse.
Le silence de ma mère. A. Silber
Premier roman d’Antoine Silber. Un roman, et non un récit, pour raconter son histoire personnelle au plus près de la vérité. En toile de fond, nous nous replongeons dans la France des années cinquante. Les parents d’Antoine Silber se rencontrent juste avant la seconde guerre mondiale mais les circonstances ne sont pas favorables. En effet, son père est juif et le mariage se fait contre l’avis des deux familles. Quatre enfants vont naître de cette union. L’auteur grandit dans une maison près de Paris, à l’ombre de la figure maternelle: une femme singulière qui voulait être peintre. Le désir d’un garçon pour sa mère est le thème de ce joli roman. Antoine Silber tente de reconstituer le puzzle de son histoire; la lectrice assiste aux émouvantes séances de sa psychanalyse. Par cette démarche, il cherche à comprendre son propre rapport aux femmes et esquisse le portrait de cette mère rebelle. Un roman sur le silence et le malentendu. Bon moment de lecture.
L’Exception. A. Ava Olafsdottir
Très belle édition pour cette fiction particulière. Un roman d’Audur Ava Olafsdottir c’est, d’abord, une atmosphère lunaire (cf « l’embellie »). En effet, les volcans et les rivières de glace qui inondent les sables d’Islande et les champs de lave donnent une couleur singulière à cette histoire. L’héroïne et narratrice est une jeune trentenaire, maman de jumeaux de trois ans. Maria est mariée depuis onze ans à Floki qui, le jour du nouvel an, fait son coming out. Il lui annonce qu’il part vivre chez son amant et collègue de travail. Après la stupeur, Maria commence à se repasser les épisodes de leur vie commune afin de comprendre. Au même moment, elle rencontre son père biologique pour la première fois. Perla, sa voisine naine et romancière, la soutient dans cette épreuve pendant qu’un autre voisin l’observe amoureusement. Dans la lueur pâle de l’hiver boréal, nous suivons l’histoire de cette mère de famille désemparée. L’auteure nous livre ses secrets d’écriture grâce au personnage de Perla et dévoile une part de son travail. Elle embarque totalement la lectrice dans son ciel nocturne de midi et décortique minutieusement les relations amoureuses compliquées. Ce qui frappe la lectrice, avant tout, c’est le calme de l’héroïne qui l’emporte sur la rancune et la haine. Un roman social écrit avec grâce et bienveillance. Excellent moment de lecture.
Les derniers Géants. F. Place
Ce livre d’aventure a été écrit par François Place et récompensé par plusieurs prix littéraires. Beaucoup de très belles illustrations dans cet album qui s’adresse aux lecteurs de 11 à 12 ans. L’esprit du livre s’inspire de l’univers de Jules Verne puisqu’il s’agit de l’histoire d’un explorateur du dix neuvième siècle. Tout commence par une promenade sur les docks de Londres et l’achat d’une dent de géant à un vieux matelot…Archibald partira, ensuite, en expédition à la recherche du peuple des géants. Ce narrateur curieux et touchant raconte magnifiquement bien son extraordinaire voyage. Un conte sur la découverte, la différence, la beauté, l’amitié mais aussi la cruauté de l’homme et la trahison.
Marie Curie. X-L.Petit
Cette biographie de Marie Curie permet aux élèves de CM2 (6ème primaire) de découvrir une grande scientifique. Xavier-Laurent Petit nous raconte sa vie de manière chronologique et sans ennui. Il découpe en chapitres l’histoire de celle qui a découvert l’énergie nucléaire, depuis son arrivée en France en 1891 jusqu’à son admission au Panthéon (1995). Un livre à glisser entre les mains de nos enfants et à lire ensemble pour une bonne compréhension. Moment de lecture pédagogique.
La petite marchande de souvenirs. F. Lelord
Suite à la parution de ce roman en édition poche, j’ai décidé de rattraper le temps perdu. François Lelord nous raconte, ici, une très jolie histoire qui se déroule au Vietnam. Vers 1995, à Hanoi, un jeune médecin, nommé Julien, travaille pour l’Ambassade de France. En rapport avec des vietnamiens, des expatriés et des diplomates, il souhaite perfectionner la langue et suit des cours de vietnamien avec la charmante Mademoiselle Fleur. Parallèlement, il entretient une relation avec une femme médecin britannique, Cléa. Un jour, au bord du lac, il rencontre une jolie marchande de souvenirs qui porte le doux prénom de Minh Thu, « lumière d’automne » en français. Julien est partagé par ses sentiments, son désir et sa propre censure. En toile de fond, nous découvrons un pays qui commence à s’ouvrir au monde avec ses moeurs et ses pratiques; un peuple marqué par l’histoire et la guerre. Peu avant Noël, une épidémie se déclare. Nous suivons, alors, avec angoisse les ravages de ce mystérieux virus à travers le Vietnam. Quelques références littéraires viennent illustrer cette belle fiction: « le chagrin de la guerre » de Bao Ninh, la traduction de « sans famille » en vietnamien ou le livre de Kim Vân Kiêu. La question de l’influence du christianisme est soulevée. L’auteur ne souhaite pas refaire l’histoire mais questionne intelligemment par le biais de ses personnages. L’amour entre deux personnes que tout sépare est le thème central de cette invitation au voyage particulièrement poétique. Bon moment de lecture.
Belges&Buts. A. Du Bus et M. Vellut
Voici un pur produit belge: les petites histoires des diables rouges, l’équipe nationale de football. Impossible de ne pas lire ce petit livre sans sourire et se remémorer Enzo Scifo, Jean-Marie Pfaff, Preud’Homme, Goethals etc… Anecdotes, scandales, citations hilarantes, résultats de match et quizz ponctuent ce livre bourré d’autodérision. D’un coup, la voix d’Arsène Vaillant surgit derrière les mots et les souvenirs d’enfance affluent… Matthieu Vellut (et son compère) démontre, ici, son implacable humour de supporter. Bon moment de lecture!
La maison atlantique. P. Besson
Voici un roman moderne et efficace. Le narrateur se souvient des vacances passées avec son père dans leur maison familiale, l’été de ses dix-huit ans. Il raconte, ici, son histoire et dévoile ses pensées, ses réflexions intimes. Sa mère est morte, dans cette maison de bord de mer, quelques années auparavant. Commence alors un séjour où se trame un drame aux accents de vengeance. Entre le père et le fils, beaucoup trop d’incompréhensions et de sous entendus. Le fils est jeune, narcissique, désinvolte et rancunier tandis que le père est présenté comme un personnage puissant, prédateur, égoïste et responsable de la mort de sa femme. Philippe Besson écrit dans un style incisif, sans fioriture ni détour, et dissèque avec justesse les relations humaines. A la manière de Sarraute, il cherche, derrière les mots et les regards, une vérité. Il y a aussi un semblant de négligé, de désinvolture, comme chez Sagan dans ce roman empreint de cruauté. La lectrice entrevoit parfaitement les images de cette fiction prenante et ses personnages englués dans le piège de la trahison: deux maisons voisines entre lesquelles le désir circule dans la chaleur de l’été. Philippe Besson maîtrise le suspense, avec talent, dans ce roman tragique. Excellent moment de lecture.