Miguel Bonnefoy vient de recevoir le Prix des Libraires 2021 pour ce roman qui ressemble à un conte : au 19ème siècle, la famille Lonsonier abandonne le Jura, et ses vignes infestées par le phylloxéra, pour tenter sa chance au Chili. Muni d’un seul cep de vigne, le patriarche retente sa chance sur les terres andines. Cette histoire d’exil et de transmission, qui se déploie sur quatre générations, est faite de rencontres et de rebondissements, d’abord à cause des guerres puis de la dictature chilienne. Les pages qui décrivent les tortures, les blessures, sont d’un réalisme stupéfiant. Avec talent, Miguel Bonnefoy raconte cette saga familiale dont les personnages marquent la lecture. Cependant, la lectrice n’a pas été captivée par cette fiction empreinte de cruauté, d’imaginaire et de fantastique. Le seul fragment lumineux de cette fiction repose sur le personnage de Thérèse, une ornithologue dans l’âme qui compose une volière à la fois exotique et poétique. Sa fille Margot rêvera, elle aussi, de pouvoir voler…
Archives mensuelles : juin 2021
Lettres à un jeune auteur. C. McCann
Si vous avez envie d’écrire, les conseils de Colum McCann peuvent vous stimuler. L’auteur irlandais, qui enseigne l’écriture créative à New-York, n’hésite pas à bousculer l’écrivain en herbe : « Lis à haute voix, mets-toi en jeu, échoue. » Avant tout, pour Colum McCann, il n’y a pas de règles. Toutefois, la première phrase d’un récit (incipit) doit frapper à la poitrine, impulser un élan pour permettre d’installer l’histoire. D’après lui, l’astuce consiste à être ouvert au monde pour guetter l’inspiration car c’est l’imagination qui fait naître une réalité et des personnages. Notre société est un gisement à exploiter, il faut donc disposer d’un carnet pour noter des idées, des mots, des expressions ; matériau précieux. Qui, quoi, où, quand, comment et pourquoi ? Ce sont ces questions qui doivent permettre, au futur auteur, d’écrire une histoire structurée, rythmée et profonde qui plaira aux lecteurs. Enfin, la dernière phrase (excipit) révèlera le talent de l’écrivain tout en stimulant l’imagination du lecteur. Ce petit ouvrage, truffé d’humour et de bons conseils, peut réellement servir de guide. Bon moment de lecture.
Journal d’un écrivain. V. Woolf
Figure marquante de la littérature anglaise, Virginia Woolf a publié des romans célèbres comme « Les vagues », « Orlando » ou « La promenade au phare ». Grâce à son mari, nous pouvons nous plonger dans son journal intime, des extraits rédigés entre 1915 et 1941, quelques jours avant son suicide. Virginia Woolf y fait état de son rapport à l’écriture, de sa crainte de la mort, de la dépression qui s’installe durablement, du corps qui vieillit, de ses amitiés…Elle écrit dans son journal par amour pour la vérité, elle s’y dévoile, décrit ses voyages, ses états d’âme, ses joies, ses inquiétudes. Au fil des pages, la lectrice devine l’écrivaine penchée au-dessus de sa machine à écrire, récitant à voix haute des fragments de ses ouvrages, tentant de garder le rythme…Bon moment de lecture.
ARIA. N. Hozar
Ce roman dense nous emmène en Iran, du côté de Téhéran. A travers le destin singulier d’une enfant, Nazanine Hozar décrit trois décennies de l’histoire de son pays (1953-1980). Par une nuit d’hiver, Behrouz, un chauffeur de l’armée, trouve une petite fille abandonnée, la recueille et la prénomme Aria. Mais la femme de Behrouz, Zahra, ne supporte pas cette petite fille aux yeux bleus et la maltraite. Finalement, au cours de sa vie, Aria va connaître trois figures maternelles. Après les mauvais traitements de Zahra, c’est une riche veuve qui va l’adopter et l’éduquer ; lui offrir un avenir. Enfin, une mystérieuse femme, Mehri, lui donnera les clés de sa vérité. Ce roman intense est une saga passionnante, portée par une femme dans un pays en désuétude. Au fil des pages, la lectrice découvre le mécanisme de la société iranienne, les différents quartiers de Téhéran et les spécificités de la culture persane…jusqu’à ce que la Révolution éclate. Bon moment de lecture.
Walden ou la vie dans les bois. H. D. Thoreau
Au 19ème siècle, dans le Massachusetts, Henry David Thoreau vit selon le principe de la simplicité volontaire. En 1845, il décide de changer de vie et construit sa cabane dans les bois, de ses propres mains. Pendant deux ans, au bord de l’étang Walden et en dehors de la civilisation, l’écrivain solitaire mène une réflexion sur le sens de la vie, notre rapport à la propriété, à la nature et au corps. Mais pourquoi ce choix ? Cette expérience de vie singulière permet à Thoreau de prendre du recul par rapport à la collectivité et de vivre dans la nature sauvage. Ce contact avec la faune et la flore lui permet d’exister intensément, de nous offrir ce magnifique texte et de se retrouver avec lui-même. A travers cette réflexion, Thoreau nous invite à nous réveiller en gardant un lien avec la nature et une attention aux petites choses ordinaires. Bible de l’écologie, mêlant à la fois observations et connaissances à travers de longues descriptions, la quête de Thoreau est devenue, aujourd’hui, un monument de l’histoire littéraire américaine. Bon moment de lecture.
Ce genre de petites choses. C. Keegan
Dans ce court récit, Claire Keegan revient sur le scandale irlandais des « blanchisseries de la Madeleine ». L’auteure trace le portrait d’un homme ordinaire qui va porter secours à des mères célibataires, exploitées par des religieuses. En cet hiver 1985, Bill Furlong part livrer du bois et du charbon au couvent du « Bon Pasteur ». En poussant une porte, l’artisan découvre une jeune femme grelottante qui a, visiblement, passé la nuit dans la réserve à charbon. Courageux, Bill va s’opposer aux usages en cherchant à connaître l’identité de ces misérables blanchisseuses au service du couvent. En revenant sur ces faits particulièrement douloureux, Claire Keegan nous parle d’émotions enfouies et de compassion. Bon moment de lecture.
Je voudrais partir avec un mot de vous. T. Réno
Cette première publication me semble prometteuse car en racontant une histoire banale, Thierry Réno arrive à nous chambouler. Voici le pitch : dans un centre hippique, Thierry fait la connaissance d’une cavalière, Maud Vitrac, avec laquelle il part en promenade de reconnaissance. Au cours de cette balade, un orage éclate, les chevaux s’emballent et la foudre tombe à leurs pieds…Thierry Réno explore ses cinq sens pour nous livrer le récit d’une rencontre sensuelle. En bonus, et pour les lecteurs les plus coquins, trois nouvelles érotiques. Bon moment de lecture.