La fileuse de verre. T. Chevalier

La Fileuse de verre par Chevalier

Tracy Chevalier est l’auteure anglo-américaine de best-sellers dont « La jeune fille à la perle » , « Prodigieuses créatures » ou « La dernière fugitive » . Excellant dans l’art du détail, l’écrivaine décrit magnifiquement le destin d’héroïnes issues d’univers singuliers. A la manière d’un caméléon, Tracy Chevalier se focalise sur un sujet pour en prendre la couleur et construire son roman. La lectrice a aimé ces grands moments de lecture. D’un autre côté, son style peut lasser au fil d’une fiction dépourvue de grands frissons. Le roman débute à la Renaissance, en Italie. Orsola Rosso est la fille d’un maestro verrier, installé sur l’île de Murano. Condamnée aux tâches ménagères, Orsola va pourtant réussir à bousculer les traditions en reprenant, peu à peu, les rennes de l’atelier familial. Tracy Chevalier fait voyager en nous invitant à faire des bonds dans le temps. Sur cinq siècles, la lectrice suit le destin singulier d’Orsola, de l’industrie du verre et de la Sérénissime : Venise. Les personnages du roman font face aux pandémies, aux guerres, aux amours et aux deuils en croisant quelques personnages historiques. Un long voyage dans le temps ; une émancipation de femme. Bon moment de lecture.

Hot Milk. D. Levy

Hot Milk par Levy

Deborah Levy pose le décor de sa nouvelle fiction dans un paysage aride. La narratrice est une jeune femme britannique vulnérable, Sofia. Depuis l’enfance, elle cherche à interpréter les maux de sa mère. Fille unique de parents divorcés, Sofia est en manque de son père. Anthropologue de formation, la jeune femme met sa vie entre parenthèses pour conduire sa mère, Rose, dans une clinique d’Alméria afin de soigner une mystérieuse maladie. Le Docteur Gomez prend Rose en charge mais il semble impuissant. Est-il un charlatan ou un génie ? Véritable figure paternelle pour Sofia, le docteur va chercher à la libérer de sa mère, l’inciter à être audacieuse et intrépide. Sur la plage, Sofia fait la rencontre de Juan qui soigne sa piqure de méduse ; la brûlure du désir. Cette créature marine n’a pas été choisie au hasard, par Deborah Levy, car la méduse représente un puissant symbole du féminin, une figure mythologique. L’importance du corps, l’eau et le soleil sont au centre de ce roman de bord de mer où il fait de plus en plus chaud. Le personnage d’Ingrid Bauer incarne également le désir, la séduction et une forme de toxicité. A travers le regard intense de Sofia sur les choses de la vie, l’auteure britannique nous parle de la complexité de la relation mère fille. Mais au fil des chapitres, il est surtout question de l’hypocondrie d’une mère qui cherche à attirer l’attention. Le style et le ton de Deborah Levy sont singuliers. L’univers du roman balance entre une ambiance onirique et la réalité. Finalement, ce roman initiatique, et profond, interpelle la lectrice par l’universalité de ses thèmes. Bon moment de lecture.

La vie intime. N. Ammaniti

La Vie intime par Ammaniti

Au fil du nouveau roman de Niccolo Ammaniti, il est question de la vie intime d’une femme de politicien. Maria Cristina Palma est l’épouse du président du Conseil italien. Désignée par les médias comme étant la plus belle femme du monde, Maria Cristina est malheureuse dans sa position de femme trophée. Un soir, elle retrouve un amour de jeunesse qu’elle avait oublié. Mais lorsque celui-ci lui envoie une vidéo de leurs ébats, la belle commence à paniquer. Parano, maladroite et frivole, Maria Cristina va tout faire pour éviter la diffusion de cette vidéo sur les réseaux. Judicieusement construite, cette fiction aux multiples rebondissements dépeint ironiquement une société du paraître et de l’image. En choisissant ses mots et ses métaphores savoureuses, Niccolo Ammaniti nous amuse sans laisser de place à l’ennui. Une comédie légère au rythme effréné qui a le pouvoir de nous faire voyager en Italie. Bon moment de lecture. Prix Viareggio.

Le Censeur. A. Tremblay

Le censeur

Dans la grande famille de la francophonie, voici un roman québécois qui interpelle la lectrice. En 2019, cinq mille livres ont été détruits par le conseil scolaire catholique de l’Ontario, au Canada. Face à ce type d’autodafé, et certains processus du système de l’édition, Alexandre Tremblay se rebiffe et défend sa liberté de pensée. Au fil des pages, la lectrice suit le parcours d’un jeune diplômé, sans estime pour lui-même, qui accède au marché du travail. Afin de s’intégrer socialement, le jeune homme renonce à ses convictions, renie son idole (Houellebecq) et entre au Ministère de l’Education du Québec comme « réviseurices-correcteurices ». En effet, avant de pouvoir diffuser des publications dans le système scolaire québécois, François-Xavier a la lourde tâche de relire et de censurer certaines formulations dans une optique inclusive ; la reconstruction d’un imaginaire collectif inoffensif. Mais jusqu’où se conformera t-il ? Grâce à son style empreint d’humour et de cynisme, Alexandre Tremblay dénonce astucieusement les dérives totalitaires du wokisme. Moment de lecture nécessaire.

Celles qu’on tue. P. Melo

Celles qu'on tue par Melo

Il faut avoir le cœur bien accroché pour lire cette fiction bouleversante. D’origine brésilienne, Patricia Melo est l’auteure de ce roman social et féministe qui se déroule dans le ventre de la jungle. En s’initiant aux rituels de cette région d’Amazonie, une jeune avocate suit le procès de trois hommes accusés d’avoir massacré et violé une jeune indienne. Fille d’une mère victime de féminicide et amoureuse d’un homme qui tente de la dominer, la jeune avocate s’engage dans une quête de justice afin de punir les responsables de féminicides. Au fil des pages, la lectrice découvre une société gangrenée par la violence envers les femmes blanches, noires, métisses, jaunes… « celles qu’on tue » . Plongée dans l’univers des peuples indigènes, la lectrice décèle aussi la beauté et la diversité d’une flore et une faune sauvages en danger ; une lueur dans les ténèbres. Un roman sombre, teinté de colère et d’injustice ; un texte nécessaire. Bon moment de lecture. Grand Prix de l’Héroïne Madame Figaro 24.

Aussi riche que le roi. A. Assor

Voici un premier roman à la fois décapant et cruel, largement primé depuis 2021. Nous sommes dans la ville de Casablanca, sous Hassan II, au cours des années 90. Sarah, le personnage principal, est une adolescente qui traîne à la lisière du bidonville des Carrières Centrales. Jeune française, installée avec sa pauvre mère obèse au Maroc, Sarah n’a que la beauté pour elle. Un jour, elle aperçoit Driss, un jeune homme du quartier d’Anfa Supérieur qui possède tout sauf la beauté. Issu d’une famille Fassi, Driss serait « aussi riche que le roi ». Afin de sortir de sa condition sociale, Sarah se met alors en tête de le séduire pour devenir son épouse. Grâce à son français, elle arrive à se fondre dans un groupe d’amis communs. Mais Sarah va découvrir à quel point la reproduction de la hiérarchisation sociale est un véritable obstacle. Le style d’Abigail Assor est singulier. Du choix des mots, de son vocabulaire, émane une certaine fraîcheur, une jeunesse ; un univers original. La lectrice a aimé découvrir cette fiction qui raconte un destin social sous « les années de plomb » ; entre légèreté et brutalité. Roman coup de cœur. Trophée Folio Elle 23. Prix Françoise Sagan 22. ..

L’heure des femmes. A. Bréau

L'Heure des femmes par Bréau

Véritable bible de la condition féminine au XXème siècle, ce roman s’adresse à tous les adultes. Adèle Bréau y retrace l’incroyable parcours de sa grand-mère, la journaliste française qui a tant œuvré pour la cause des femmes : Ménie Grégoire. Celle qui était surnommée « la Dame de cœur » , a animé deux émissions sur les ondes radiophoniques de RTL (« Allô, Ménie » et « Responsabilité sexuelle ») de 1967 à 1982. En libérant la parole, Ménie Grégoire a largement contribué à améliorer la place des femmes au sein des foyers français. Psychologue radiophonique, l’animatrice était aussi une femme de lettres, auteure de nombreux ouvrages sur la condition féminine. Dans ce formidable roman, Adèle Bréau a reproduit des lettres, des témoignages bouleversants qui laissent deviner l’ignorance et la souffrance de nombreuses femmes, à cette période. Grâce à quatre personnages féminins attachants, elle nous raconte le destin de sa célèbre aïeule. En refermant ce roman, la lectrice s’interroge sur le chemin parcouru en ce qui concerne les thèmes abordés : le couple, l’inceste, la contraception, la sexualité, l’avortement, la maternité, la solitude, la violence domestique…Lecture coup de cœur.  Prix Maison de la Presse 2023.

Poussière blonde. T. de Rosnay

Poussière blonde par Rosnay

Les romans de Tatiana de Rosnay sont souvent passionnants et bien écrits. La lectrice a adoré lire : « Elle s’appelait Sarah » , « Manderley for ever » , « Boomerang » et « Rose » . Dans ce dernier roman, et sur la base de faits réels, Tatiana de Rosnay nous raconte un épisode de la vie de Marilyn Monroe, l’été 1960 au Nevada. Judicieuse, l’auteure nous présente sa vision de l’actrice à travers le regard d’une femme de chambre prénommée Pauline. La fiction se déroule dans la ville de Reno, dans les couloirs d’un hôtel chic, le « Mapes » . Pauline est une jeune mère célibataire, passionnée par les chevaux sauvages ; des « Mustangs » . Enceinte du directeur de l’hôtel, la jeune femme fait une croix sur son avenir de vétérinaire et devient sa maîtresse. Mais l’été arrive et les acteurs du tournage « Les désaxés » débarquent au « Mapes » . Femme de l’ombre, Pauline est envoyée illico dans la suite 614 afin d’y faire le ménage. Sans s’y attendre, elle y fait la rencontre de Mrs Miller : la lumineuse Marilyn. Tatiana de Rosnay nous embarque dans un récit passionnant sous le soleil des grands espaces américains. A travers sa vision de Marilyn, nous découvrons une actrice au grand cœur, surprenante d’humanité. Au fil des pages, une incroyable amitié féminine naît, empreinte d’émotions. Lecture coup de cœur. 

L’Aigle et la Rose. S. Hayat.

L'Aigle et la Rose par Hayat

Si vous aimez les beaux livres, vous serez sensible à l’élégance de la couverture du second roman de Serge Hayat. Cette scène illustre magnifiquement l’univers de la fiction : les adieux de Napoléon à Joséphine (Laslett John Pott). Nous sommes en octobre 1799, en France. Sous les vivats du peuple, le général Napoléon Bonaparte rentre de sa campagne d’Egypte. Arrivé à Paris, Napoléon rend immédiatement visite à Paul Barras, maître du Directoire. En son temps, Barras a été l’amant de Joséphine Bonaparte, celle qu’il appelait « Rose ». Persuadé de pouvoir manipuler les époux, il ordonne à Joséphine de filer à la rencontre de son mari. Volage et infidèle, la jeune aristocrate obéit car elle craint d’être répudiée. Mais, dans ses appartements du Palais du Luxembourg, Barras voit débarquer Napoléon, coiffé de son célèbre bicorne. Amoureux fou, le général cherche désespérément sa femme. Redoutable et menteur, Barras sait qu’il a une carte à jouer. Au fil des pages, un malicieux jeux de pouvoir se met en place. Ingénieux, Serge Hayat nous tient en haleine tout au long de ce huis clos, à la fois efficace et diabolique. En voyageant dans le temps, l’auteur nous offre son point de vue sur un fragment d’histoire et un couple étonnant : l’Aigle et la Rose. Excellent moment de lecture.

La vie clandestine. M. Sabolo

La Vie clandestine par Sabolo

Voici le dernier et le meilleur roman de Monica Sabolo, paru chez « Folio » . En cherchant une idée de fiction, l’écrivaine française a choisi son sujet : l’organisation d’ultra-gauche « Action directe » qui a commis plus de quatre-vingt attentats en France, dans les années 80. Sujet sensible d’une mémoire collective, l’enquête de l’auteure passionne autant que les personnages clandestins de l’organisation terroriste. Tout en enquêtant, Monica Sabolo s’interroge sur ses propres origines, revient sur son passé en Italie et ses douleurs d’enfant abusée. D’une vie clandestine à l’autre, l’enquête se mue en lutte ; une recherche de vérité. Au fil des pages, Monica Sabolo cherche des réponses aux transgressions des terroristes mais aussi aux transgressions de son père. Finalement, les secrets et les mensonges des membres « d’Action directe » résonnent singulièrement dans la vie de l’auteure. Comme à son habitude, Monica Sabolo manie l’autodérision comme personne dans ce récit autobiographique bouleversant de sincérité. Il est question de violence et de pardon au cours de cette longue réflexion qui convoque la mémoire. Excellent moment de lecture. Grand Prix de l’héroïne Madame Figaro 2023. Prix du Roman News 2022.

555. H. Gestern

555 par Gestern

Paru chez « Folio », ce roman choral d’Hélène Gestern est un véritable « page-turner ». Au fil de la lecture, l’intrigue se révèle haletante. L’auteure nous plonge dans l’univers feutré et méconnu de la musique classique. En effet, cinq personnages, tous épris des compositions de Domenico Scarlatti, sont à la recherche d’une mystérieuse partition qui, à peine déchiffrée, disparaît. La partition attise toutes les convoitises car elle serait la 556ème sonate inédite du célèbre compositeur italien. Douée pour nous mettre sur de fausses pistes et susciter de multiples émotions, l’auteure est une virtuose de la plume. Au fil des pages, la lectrice découvre les différents personnages de ce roman choral : un ébéniste, un restaurateur d’instruments anciens, une musicienne spécialiste du clavecin, un musicologue et un riche mécène belge. Formidable moteur narratif, l’énigme va révéler trahisons et mensonges dans la vie de chacun. Un brillant polar pour mélomanes. Excellente lecture. Grand Prix RTL-Lire Magazine. Prix Relay des voyageurs lecteurs 2022. 

Sarah, Susanne et l’écrivain. E. Reinhardt

Sarah, Susanne et l'écrivain par Reinhardt

Eric Reinhardt est un auteur singulier qui se glisse, avec une impressionnante facilité, dans la peau de ses personnages féminins. Dans son dernier roman, il est question de Sarah, une architecte quadragénaire qui vit en Bretagne avec ses deux enfants et son mari. Tout a l’air de sourire à cette femme créative et bourgeoise. Pourtant, tous les soirs, son mari a la fâcheuse manie de s’isoler dans une autre pièce de la maison. Petit à petit, la vie de famille se rétrécit. Mal aimée, Sarah se rend compte, par hasard, qu’elle possède moins de la moitié de la maison familiale. Dominée financièrement par son mari, elle lui en parle mais il ne rectifie pas la situation. Alors, Sarah décide de s’éloigner de son foyer pour créer un électrochoc. Mais finalement, son départ va provoquer de l’incompréhension et du désamour. Anéantie, Sarah propose à un écrivain d’écrire son histoire sous le pseudonyme de Susanne. L’idée est intéressante, très prometteuse pour une lectrice qui s’identifie à certains aspects féminins. Les thèmes de l’emprise, du couple et du patriarcat attirent indéniablement l’attention. A cela s’ajoute la vente d’un mystérieux tableau ancien qui tient la lectrice en haleine, quelques minutes. Mais lorsque Sarah fait une crise de démence, le rythme du roman se fracasse brusquement. Déboussolée, la lectrice perd le fil de la lecture. Comme à son habitude, Eric Reinhardt propose une mise en abyme violente qui déconcerte irrémédiablement la lectrice.

Une histoire naturelle de l’amour et de la mort. M. Renkl

Une histoire naturelle de l'amour et de la mort par Renkl

Margaret Renkl est une éditorialiste américaine. Dans ce récit, construit en courts chapitres, elle évoque tendrement sa famille, son enfance en Alabama, et son insatiable curiosité face à une nature en danger. Au fil de la lecture, son histoire personnelle s’entremêle au vivant et touche notre corde sensible. Avec talent, Margaret Renkl superpose le cycle de la vie aux saisons, décrit minutieusement la migration des papillons monarque, la nidification des oiseaux, la férocité de la faune et l’utilité de la flore. Le dénominateur commun du récit est bien l’amour que porte Margaret Renkl aux être vivants, tous condamnés à mourir. Un livre qui émerveille. Lecture coup de cœur. 

Proust, roman familial. L. Murat

Proust, roman familial  par Murat

Laure Murat est une princesse française érudite, historienne et professeure de littérature à l’Université de Californie. Après son « coming out », Laure Murat a préféré s’éloigner de sa famille, ce milieu « de formes vides ». Des années plus tard, dans le cadre d’un projet littéraire au sujet de Marcel Proust, l’écrivaine a trouvé des résonnances entre les membres de sa famille et les personnages issus de l’œuvre : « A la recherche du temps perdu ». Avec talent et perspicacité, Laure Murat ressuscite les membres de son illustre famille et nous éclaire sur le travail et l’inspiration du plus célèbre écrivain français. Au fil de son écriture, Laure Murat découvre le pouvoir d’émancipation de la littérature, son pouvoir de consolation et de réconciliation. Un récit qui montre à quel point Marcel Proust a changé la vie de cette femme. Bon moment de lecture. Prix Médicis Essai 2023.

Les lions de Sicile. S. Auci

La saga des Florio, tome 1 : Les lions de Sicile par Auci

Si vous souhaitez vous plonger dans la saga d’une grande famille italienne, ce roman est pour vous. A la fin du 18ème siècle, les frères Florio quittent leur Calabre natale pour s’installer en Sicile. Avec passion et talent, Stefania Auci nous conte l’histoire de ces frères qui se lancent dans le commerce des épices et rencontrent le succès. Malgré la réussite, ils ne sont pourtant pas à l’abri des drames de la vie et du mépris des Palermitains. Dans ce premier tome, la lectrice suit trois générations de Florio avec l’histoire de la Sicile en toile de fond. Les personnages sont puissants, les amours secrètes et les trahisons foudroyantes. Une chronique familiale captivante à suivre dans les prochains tomes. Bon moment de lecture.

Veiller sur elle. J-B Andrea

Veiller sur elle par Andrea

Pourquoi ce roman a t-il remporté le Prix Goncourt ? D’après la lectrice, parce qu’il possède des qualités littéraires, en abondance. Jean-Baptiste Andrea nous emmène en voyage, retrace l’histoire d’un destin, celui d’un garçon italien pauvre, souffrant de nanisme. A la fin de sa vie, dans l’obscurité d’une abbaye, Mimo revient sur son incroyable parcours. Malmené et maltraité par sa famille et ses patrons, notre narrateur va pourtant devenir un grand sculpteur au cours de la première partie du XXème siècle. Au fil des pages de ce roman lumineux, Mimo se révèle à la fois attachant et bouleversant. A l’adolescence, et dans de mystérieuses conditions, il rencontre Viola Orsini, une adolescente issue d’une famille riche et puissante. Rien ne pouvait rassembler ces deux êtres. Pourtant, ils vont se lier d’une profonde et indéfectible amitié tout au long de leur vie. Rebelle, inventive et audacieuse, Viola va tout faire pour échapper à sa condition de femme. La Seconde Guerre mondiale et la montée du fascisme, en Italie, seront des temps forts dans leur relation. Grâce à son talent, Mimo sculpte de nombreuses œuvres dont une énigmatique et magnifique Pietà qui bouleverse le public au point d’être enlevée par le Vatican. Influencé par la beauté et l’Art, Jean-Baptiste Andrea excelle dans sa façon de raconter, de toucher la lectrice en visant le cœur. Ses personnages sont forts au point de continuer à vivre après la lecture de ce roman profond et lumineux. Prix Fnac. Prix Goncourt.

Avoir un corps. B. Giraud

Avoir un corps par Giraud

En 2022, Brigitte Giraud a remporté le Prix Goncourt pour son bouleversant récit autobiographique : « Vivre vite ». Curieuse de découvrir un autre livre de cette auteure, j’ai choisi un roman publié en 2013 : « Avoir un corps ». Dans un long monologue, la narratrice décrit son rapport au corps depuis la petite enfance jusqu’à l’âge adulte en passant par l’avortement, la maternité et le deuil. Au plus près de sa vérité, Brigitte Giraud nous décrit les premières fois d’une femme, de la joie à la douleur, en cinq parties. Au fil des pages, il est question d’un corps qui bouge et évolue ; un langage. Avec talent et dans un style pudique et délicat, l’écrivaine retrace cette touchante expérience, à la fois singulière et féminine. Excellent moment de lecture.

Le Pavillon d’Or. Y. Mishima

Le Pavillon d'or

Le Pavillon d’Or est une merveille architecturale du temple Rokuonji, à Kyoto. A partir d’un fait divers, Yukio Mishima romance la vraie histoire d’un bonze (Mizoguchi) qui mit le feu au Pavillon d’Or, en juillet 1950. Bègue au crâne rasé, Mizoguchi est également le narrateur du roman. Avant de plonger dans la fiction, la lectrice vous conseille de passer la longue préface qui oriente trop la lecture. Dès les premières pages, Mizoguchi revient sur son parcours personnel et son intérêt pour le Pavillon d’Or. En devenant bonze, il s’immerge dans la quiétude d’un monastère bouddhique zen, une vie communautaire qui n’échappe pourtant pas à l’hypocrisie, la haine et la trahison. A travers cette fiction, l’auteur montre à quel point, après Hiroshima et la guerre, la foi de la jeunesse est malmenée. Obsédé par la beauté d’une jeune fille décédée, Mizoguchi va mettre en place un mécanisme de déviation étroitement lié à l’énigme de la beauté et au fameux « Pavillon d’Or ». A travers son héros, l’auteur traite brillamment du thème intemporel de la beauté dans un style métaphorique singulier. Au fil de la lecture, les mots se transforment en images poétiques, idéales et typiques du pays du Soleil levant. Pourquoi Mizoguchi va t-il brûler le temple ? Pareil à un koan japonais, chacun interprètera ce récit à sa façon. Bon moment de lecture. 

La petite menteuse. P. Robert-Diard

La petite menteuse par Robert-Diard

Actuellement en salle, deux excellents films français font la part belle à des procès : « Anatomie d’une chute » (Justine Triet) et « Le Procès Goldman » (Cédric Khan). En littérature, « La petite menteuse » décrit le procès en appel d’un homme accusé de viol par Lisa, 15 ans. En première instance, Marco Lange a été condamné à dix ans de réclusion. En position de victime, Lisa avoue finalement son mensonge à sa nouvelle avocate. Lors du procès en appel, Alice Kéridreux va plaider la cause de Lisa devant des jurés effarés. L’enjeux du roman est bien de faire aimer cette petite menteuse malgré la complexité du dossier. Par la voix d’Alice, Pascale Robert-Diard essaie de comprendre pourquoi des adultes, bien intentionnés, ont gobé tout cru le mensonge de l’adolescente. Efficace et bien rythmée, cette brillante fiction plonge la lectrice dans le monde de la juridiction pénale en interpellant tout au long de la lecture. Chroniqueuse judicaire au journal « Le Monde » , Pascale Robert-Diard était particulièrement bien placée pour écrire ce roman puissant. Excellente lecture. Prix Goncourt des Lycéens.

L’atelier d’écriture. N. David-Weill

L'atelier d'écriture par David-Weill

Romancière, Natalie David-Weill a notamment dirigé un atelier d’écriture à Bruxelles. Dans ce dernier roman, elle nous plonge précisément au cœur d’un stage d’écriture. La narratrice s’appelle Esther, célibataire, influenceuse et auteure d’un livre de recettes. A la suite d’une rupture, elle décide de suivre son amie Niki dans son désir d’écriture. Autour d’une table, les deux complices rencontrent cinq autres participants, des hommes et des femmes qui cherchent à parfaire leur technique littéraire. Certains personnages sont attachants, à l’instar de Georges qui traîne son chagrin et écrit des textes pour échapper à l’oubli de sa femme défunte. Dubitative au cours des premières séances, Esther va participer de plus en plus activement à cet atelier hebdomadaire, animé par un certain Stéphane. En s’appuyant sur de nombreuses références littéraires, Natalie David-Weill en profite pour distiller, au fil du récit, de judicieux conseils d’écriture. Bon moment de lecture.  

Le dimanche des mères. G. Swift

Le dimanche des mères par Swift

Ce livre vient d’être adapté au cinéma sous le titre « Entre les lignes » . L’univers de ce roman anglais est semblable à l’atmosphère de « Dowton abbey » car Graham Swift y dépeint subtilement la vie de familles aristocratiques et celle de leurs domestiques, au début du XXème siècle. Traditionnellement, en Angleterre, le dimanche des mères correspond à un jour de congé. Au service de la famille Niven, Jane Fairchild est une orpheline qui se passionne, à ses heures perdues, pour la littérature. En secret, la jeune domestique choisit de passer son dimanche dans les bras de Paul Sherigham, un fils de bonne famille avec lequel elle entretient une liaison. Dans le manoir de Paul, sensualité, grâce et romantisme sont au programme. Mais ce dimanche sera leur dernier rendez-vous car Paul doit bientôt épouser une héritière de sa condition. Pourtant, un imprévu va venir tout perturber. Avec talent, Graham Swift nous fait découvrir les sentiments des deux amants à travers le regard de Jane, à la fin de sa vie. Au fil des pages, Graham Swift dévoile talentueusement la passion dévorante de Jane pour la littérature et son destin singulier.  Bon moment de lecture.

Celle qui est revenue. D. Di Pietrantonio

Celle qui est revenue par Di Pietrantonio

Si vous cherchez une lecture singulière, publiée en édition « Livre de Poche », voici le troisième roman de Donatella Di Pietrantonio. L’auteure nous plonge dans une fiction qui se déroule en Italie, dans les années 70. Après avoir passé une enfance tranquille et bourgeoise, une adolescente découvre qu’elle a été adoptée. Enfant unique, elle est finalement rendue à ses parents biologiques et perd ses repères. L’adolescente vit mal cet abandon et peine à s’adapter à sa famille biologique, nombreuse, pauvre et sans états d’âme. Grâce à sa sœur, Adriana, l’héroïne va finalement réussir à s’adapter à son nouveau milieu. Loin des mensonges et des secrets familiaux, « celle qui est revenue » découvre l’amitié et l’amour filial. Ce récit d’apprentissage bouleverse et rappelle l’univers de la tétralogie d’Elena Ferrante « Une amie prodigieuse ». Bon moment de lecture. Prix Campiello 2017.

Les douleurs fantômes. M. Da Costa

Les douleurs fantômes par Da Costa

J’ai découvert tardivement Mélissa Da Costa à travers son joli roman « Les lendemains ». Malheureusement, son dernier roman « Les douleurs fantômes » ne m’a pas autant enthousiasmé. Pourtant, il faut reconnaître le talent et l’imagination de cette auteure française ; elle sait raconter des histoires même si celle-ci est trop longue. Ambre est le personnage principal de la fiction. La jeune femme n’a plus donné signe de vie à son groupe d’amis depuis sa rupture avec Tim. Un jour, Rosalie contacte Ambre suite à l’absence prolongée de son mari Gabriel. Cinq ans après leur dernière conversation, Ambre rejoint son amie Rosalie pour la consoler. De retour dans la ville d’Arvieux, Ambre revoit son ex petit ami, Tim, en couple avec un certain Anton. Evidemment, les souvenirs rejaillissent et la vie d’Ambre se retrouve chamboulée. Bon moment de lecture.

Archie. A. Cardyn

Archie par Cardyn

Ce petit roman plaira aux lecteurs et lectrices les plus sensibles car il y est question de résilience. Notre narrateur s’appelle Archie, un garçon né d’une mère toxicomane et d’un père absent. Placé en institution, Archie écrit des poèmes à sa mère et cherche à la revoir au moment de l’adolescence. Assoiffé de liberté, Archie va ensuite faire sa valise et quitter l’institution pour marcher sur le sentier des douaniers en Bretagne. Après des centaines de kilomètres, il espère rejoindre une école démocratique ; un pas vers sa liberté. Mais au moment de sa naissance, une sage-femme nommée Madeleine avait veillé sur son berceau. Tout en marchant sur le sentier face à la mer, Archie découvre les carnets de Madeleine ; ses confidences et ses secrets. La plume d’Alia Cardyn est à la fois poétique et émouvante. En nous racontant l’histoire d’Archie, cette auteure belge déploie une palette d’émotions dont certaines touchent au cœur. Bon moment de lecture.

Long week-end. J. Maynard

Résultat d’image pour Long weekend Joyce Maynard. Taille: 119 x 185. Source: www.amazon.fr

Joyce Maynard est une auteure américaine à succès. La lecture de son best-seller « Là où vivaient les gens heureux » ne m’avait pas fait grand effet. Sur les conseils d’une amie, j’ai ensuite acheté un autre roman de la même auteure : « Long week-end ». Cette fois, nous sommes sur la côte Est des Etats-Unis ; l’été 87. A quelques jours de la rentrée scolaire, un garçon et sa mère font des courses. L’adolescent est le narrateur du roman et se prénomme Henry. Dans un rayon de supermarché, Henry rencontre Frank qui lui demande de l’aide car il est blessé. En réalité, Frank vient de s’évader de prison et il va passer le long week-end du Labor Day chez Henry qui habite avec sa mère, Adèle. Joyce Maynard a eu la bonne idée d’écrire cette fiction du point de vue d’Henry car cela procure une certaine fraicheur au roman. Pour notre plaisir de lecture, l’adolescent de treize ans livre ses sentiments et toutes ses émotions. Il aborde plusieurs thèmes dont le divorce de ses parents, ses premiers émois et son amour pour Adèle, cette mère fragile et instable. Pendant six jours, Frank, Henry et Adèle vont vivre un singulier huis clos ; une expérience inoubliable. Excellent moment de lecture.

Le mystère de la femme sans tête. M. Leroy

Le Mystère de la femme sans tête par Leroy

Voici une fiction perturbante. L’auteure belge, Myriam Leroy, retrace la terrible histoire de Marina Chafroff, une femme russe qui vivait en Belgique pendant la Seconde Guerre mondiale. C’est en se promenant au cimetière d’Ixelles que l’auteure découvre la tombe d’une jeune femme. Lorsqu’elle se penche sur la pierre de granit sombre, c’est le mot « décapitée » qui la bouleverse totalement. Sur internet, le visage lumineux de cette « femme sans tête » lui apparaît. Obsédée par Marina, l’auteure décide alors de retracer sa vie pour mieux comprendre son terrible destin ; Marina s’est dénoncée suite à un attentat rue Marnix, en 1941. Dès le début de son enquête, Myriam Leroy bute sur le doute : comment une si petite femme a t-elle pu attaquer un soldat nazi ? « Le mystère de la femme sans tête » plane tout au long de la lecture. Ce livre a pourtant le mérite de nous rappeler une histoire oubliée, celle d’une femme qui s’est sacrifiée pendant la guerre, à Bruxelles. D’après la lectrice, Myriam Leroy va trop loin lorsqu’elle nous parle de la famille toute entière de Marina. De plus, les allers-retours dans le temps pèsent au cours de la lecture. Finalement, même si le sujet chamboule la lectrice, la fiction est loin de convaincre.

Les lendemains. M. Da Costa

Les lendemains par Da Costa

Grâce à une amie, j’ai découvert le deuxième roman de Mélissa Da Costa. Dès les premières pages, cette auteure française nous happe en nous coupant le souffle. Amande est l’héroïne de ce roman singulier et bouleversant. Suite au décès inopiné de son mari et de son bébé, la jeune femme s’isole dans une maison en Auvergne, au milieu de la nature. Au plus mal, Amande ne voit pas la vie s’épanouir au jardin et rejette le chat qui rôde autour de la maison. Mais un jour, intriguée par des annotations de l’ancienne propriétaire, Amande tente de redonner vie au potager et reproduit même quelques recettes. Lorsque la fille de l’ancienne propriétaire récupère des affaires dans la maison, Amande se lie d’amitié avec Julie. Sans le savoir, Julie va contribuer à sa reconstruction en aidant Amande à se projeter dans un futur. Si, chez mon libraire, j’ai trouvé le roman de Mélissa Da Costa classé dans la catégorie « feel good », je tiens à préciser que cette fiction n’est pas légère. Au contraire, véritable hymne à la renaissance et à la nature, ce roman captive et interpelle la lectrice jusqu’à la dernière page. Excellent moment de lecture.

Guetter l’aurore. J. Printzac

Guetter l'aurore par Printzac

Ce roman nous replonge dans la période sombre de la Seconde Guerre Mondiale, en France. Tout commence en 2022, lorsque Deborah rentre vivre chez sa mère, après une rupture amoureuse. Dans la maison, Esther, la grand-mère de Deborah, séjourne également. Cette dernière perd de plus en plus souvent la tête, confond sa petite-fille avec une certaine Clara. Qui est Clara ? Intriguée, Deborah se décide à en savoir plus à propos du passé de sa famille juive. Quel a été le parcours de la famille Brodsky, réfugiée au pied des Pyrénées, pendant la guerre ? Deborah repart sur les traces de ses proches, découvre la grande maison délabrée de Saint-Girons et des lambeaux d’histoire. Adolescente, Esther était la fiancée de Marius. Qu’est-il devenu ? Finalement, Clara était la meilleure amie d’Esther. Rebelle, la jeune fille s’était engagée dans un mouvement de Résistance. Malheureusement, des collabos semaient la terreur à Saint-Girons. Avec force, Julie Printzac évoque la jeunesse et les convictions de ces français, prêts à sa battre pour leur pays. Entre fiction et documentaire, Julie Printzac restitue une histoire familiale bouleversante ; une histoire qu’elle porte en elle. Bon moment de lecture.

Fuir l’Eden. O. Dorchamps

Fuir l'Eden par Olivier Dorchamps

Sur les conseils de ma libraire, j’ai découvert ce roman singulier qui offre une palette d’émotions. La couverture du livre représente L’Eden, une cité brutaliste de la banlieue de Londres où règne la violence. Dans cette barre d’immeuble en béton, Adam vit avec ses parents et sa petite sœur, Lauren. Le père, surnommé « l’autre » par Adam, frappe allègrement la mère de famille. Un jour, la mère disparaît en laissant, derrière elle, une lettre. D’après « l’autre », elle serait partie en Espagne avec son amant, abandonnant le foyer. Adam et Lauren encaissent, survivent dans la cité en compagnie de ce père alcoolique et brutal. Toujours à court d’argent, Adam fait la lecture à une dame aveugle qui lui sert de mère de substitution. Jusqu’au jour où Adam sauve de justesse une jeune fille sur le quai de l’express. Alors, l’amour devient une quête pour Adam, un adolescent fragile, sensible et attachant. Auteur franco-britannique, Olivier Dorchamps nous embarque totalement dans ce roman social. Son univers singulier accapare l’attention de la lectrice qui retrouve le style de Bruno Masi et la misère sociale des films de Ken Loach. Au fil de cette fiction contemporaine, l’espoir surgit parfois entre les lignes.  Excellent moment de lecture. Prix des lecteurs de la Maison du Livre. Prix Louis-Guilloux.

Mon mari. M. Ventura

Mon mari par Ventura

Chaque lectrice retrouvera une part d’elle même dans ce premier roman très réussi. Amoureuse folle de son mari, la narratrice nous raconte sa vie quotidienne et son obsession pour son homme ; du lundi au dimanche. Depuis quinze ans, l’héroïne s’inquiète en permanence pour son mariage, vit dans l’angoisse d’une éventuelle séparation malgré un amour partagé. En cachette, elle accède à la messagerie de son époux, note dans un carnet les comportements suspects, ses réflexions et ses doutes. Pour notre plaisir de lecture, cette traductrice et mère de deux enfants, joue un rôle sans discontinuer. Inspirée par le sentiment amoureux, Maud Ventura s’amuse à caricaturer la dépendance féminine et la passion, à l’extrême. Jubilatoire, ce roman à suspense se lit avec délice. Excellent moment de lecture. Prix du premier roman.