Voyage de noces. P. Modiano

La quête d’identité est le thème majeur de ce roman qui se présente sous forme d’enquête. Un homme désabusé se retrouve à Milan dans la chaleur du mois d’août. A l’hôtel, il apprend le suicide d’une cliente française et fait le rapprochement avec une femme juive rencontrée quelques années auparavant: Ingrid Teyrsen. Bouleversé par sa mort, le narrateur rentre en France et organise sa propre disparition en périphérie de Paris. Il assemble, alors, les souvenirs liés à Ingrid et à Rigaud, son compagnon, auquel il va curieusement s’identifier. Patrick Modiano fait appel aux souvenirs, aux sensations, aux lieux pour évoquer un moment tragique de l’histoire. Au cours de sa lecture, la lectrice retrouve la petite musique caractéristique du style de Patrick Modiano et des thèmes récurrents comme celui du temps qui passe ou celui de la déportation. Excellent moment de lecture.

La petite bijou. P. Modiano

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Le titre du roman « la petite bijou » vient du surnom de la narratrice lorsqu’elle avait sept ans. Patrick Modiano se glisse parfaitement dans la peau de Thérèse, la narratrice devenue jeune femme. Inspirée par un personnage de Balzac, « la petite bijou » croise dans le métro de Paris sa mère qu’elle pensait morte. En la suivant jusqu’à son domicile de Vincennes, elle revient sur leur passé énigmatique. Au fil de la lecture, un malaise s’installe chez Thérèse, perpétuellement à la recherche d’elle même. Dans une certaine confusion, la narratrice tente de recomposer le puzzle de son enfance, croise des personnages évanescents et revient sur des lieux qui n’existent plus. Patrick Modiano mêle toutes sortes de souvenirs, images, couleurs et sonorités dans cette fiction troublante, angoissante. L’atmosphère nostalgique du roman donne à la lecture un caractère singulier entre rêve et réalité. Bon moment de lecture.

La robe rouge de Nonna. M. Piquemal et J. Brax

La robe rouge de Nonna par Piquemal

Ce joli album est destiné aux enfants de 10 à 13 ans. Il raconte l’exil d’une famille italienne vers 1922. A la demande de sa petite fille, Nonna retrace son enfance en Italie, avant son exil en France. Avec émotion, la grand-mère se remémore le contexte, évoque sa famille puis les pénuries et l’humiliation sous Mussolini. Ce livre est un précieux témoignage qui traite de nombreux thèmes comme le racisme, l’immigration, l’identité et l’histoire de l’Europe. Inspiré par une histoire vraie, l’album est magnifiquement illustré et reproduit des chants patriotiques italiens. Mention spéciale pour le graphisme. L’évolution des couleurs, au fil des pages, est un plaisir pour les yeux de nos jeunes lecteurs. Bon moment de lecture.

Devenir soi. J. Attali

Christophe Barbier

Jacques Attali est bien placé pour savoir qu’il ne faut plus rien attendre des politiques et du pouvoir en place. Ce conseiller d’Etat et écrivain nous invite, ici, à chercher le talent qui se cache en nous pour ne plus dépendre de personne ni tenter d’obtenir une assistance permanente. Il dresse, tout d’abord, un tableau pessimiste et angoissant face à notre avenir et dénonce « les désastres » de notre société comme, par exemple, celui du système primaire scolaire. « Devenir soi » passe par une prise de conscience pour poursuivre ensuite un chemin en cinq étapes, sa méthode. Si le fond du livre est construit sur du bon sens, la forme ne motive pas beaucoup la lectrice. Jacques Attali fournit une surabondance d’exemples qui rend la lecture lassante. Il faut attendre la page 150 pour qu’enfin, l’auteur nous livre sa clé du « devenir soi ».

 

Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier. P. Modiano

Le dernier roman de Patrick Modiano, Prix Nobel de Littérature 2014, a des allures de polar. Jean Daragane est le personnage principal de cette fiction teintée de mystère et de chagrin. Lorsqu’il perd son carnet d’adresse, un couple énigmatique se présente et lui demande des informations à propos d’un certain Guy Torstel. Malgré lui, Jean Daragane se replonge, alors, dans le Paris des années cinquante et sa banlieue. Entouré de personnages énigmatiques comme celui d’Annie Astrand, sa mère de substitution, Jean Daragane se souvient progressivement de son enfance et d’une maison étrange. Le style de Patrick Modiano est incroyablement subtil et accessible. La lecture de son roman ressemble à une confidence aux résonances nostalgiques. L’omniprésence de la nature ajoute des notes poétiques à ce puzzle délicat. Un roman comme un ravissement. Coup de coeur!

Peine Perdue. O. Adam

Nous ne lisons pas tous pour les mêmes raisons: certains lecteurs cherchent à s’évader, à apprendre, à rêver, à comprendre… Le dernier roman d’Olivier Adam nous parle de la France d’aujourd’hui et de ses classes moyennes. Loin du glamour, l’auteur dresse le portrait d’une vingtaine de personnages à travers lesquels il dépeint une société française à la dérive. Le point de départ de ce roman choral est la mystérieuse agression d’Antoine dans une station balnéaire du Var, hors saison. Père du petit Nino qu’il voit peu, Antoine vit dans une caravane sur la plage. Le foot est son seul point d’horizon comme pour beaucoup de ses camarades. Un matin, quelqu’un dépose Antoine, inanimé,  devant l’hôpital. L’enquête menée par Grindel, un flic désabusé, sera le fil rouge de cette longue fiction. Révélateur du contraste social, le décor a, ici, toute son importance. Les touristes sont partis, les volets des belles villas sont fermés, la ville est déserte, mélancolique. Seuls restent les habitants livrés à leur triste sort. A sa manière, l’auteur relie l’intime au collectif à travers une communauté: des trentenaires paumés, des infirmières, des femmes de ménages, un flic, des voyous, un patron véreux, un couple de bourgeois…En toile de fond, la mer se déchaîne puis se calme, métaphore de la vie. Tout au long de la lecture, le titre s’impose: c’est peine perdue. La lectrice se prend à vouloir faire tourner la roue qui illustre la couverture. Le style d’Olivier Adam est corrosif, pessimiste, teinté de noirceur. Le constat est terriblement morose. Dans la désolation, les personnages subissent leur vie; un destin parfois tragique qui ne laisse entrevoir que peu d’espoir. Beaucoup de caricatures et de clichés dans ce roman social. Bon moment de lecture.