Si vous cherchez une lecture singulière, publiée en édition « Livre de Poche », voici le troisième roman de Donatella Di Pietrantonio. L’auteure nous plonge dans une fiction qui se déroule en Italie, dans les années 70. Après avoir passé une enfance tranquille et bourgeoise, une adolescente découvre qu’elle a été adoptée. Enfant unique, elle est finalement rendue à ses parents biologiques et perd ses repères. L’adolescente vit mal cet abandon et peine à s’adapter à sa famille biologique, nombreuse, pauvre et sans états d’âme. Grâce à sa sœur, Adriana, l’héroïne va finalement réussir à s’adapter à son nouveau milieu. Loin des mensonges et des secrets familiaux, « celle qui est revenue » découvre l’amitié et l’amour filial. Ce récit d’apprentissage bouleverse et rappelle l’univers de la tétralogie d’Elena Ferrante « Une amie prodigieuse ». Bon moment de lecture. Prix Campiello 2017.
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Les douleurs fantômes. M. Da Costa
J’ai découvert tardivement Mélissa Da Costa à travers son joli roman « Les lendemains ». Malheureusement, son dernier roman « Les douleurs fantômes » ne m’a pas autant enthousiasmé. Pourtant, il faut reconnaître le talent et l’imagination de cette auteure française ; elle sait raconter des histoires même si celle-ci est trop longue. Ambre est le personnage principal de la fiction. La jeune femme n’a plus donné signe de vie à son groupe d’amis depuis sa rupture avec Tim. Un jour, Rosalie contacte Ambre suite à l’absence prolongée de son mari Gabriel. Cinq ans après leur dernière conversation, Ambre rejoint son amie Rosalie pour la consoler. De retour dans la ville d’Arvieux, Ambre revoit son ex petit ami, Tim, en couple avec un certain Anton. Evidemment, les souvenirs rejaillissent et la vie d’Ambre se retrouve chamboulée. Bon moment de lecture.
Archie. A. Cardyn
Ce petit roman plaira aux lecteurs et lectrices les plus sensibles car il y est question de résilience. Notre narrateur s’appelle Archie, un garçon né d’une mère toxicomane et d’un père absent. Placé en institution, Archie écrit des poèmes à sa mère et cherche à la revoir au moment de l’adolescence. Assoiffé de liberté, Archie va ensuite faire sa valise et quitter l’institution pour marcher sur le sentier des douaniers en Bretagne. Après des centaines de kilomètres, il espère rejoindre une école démocratique ; un pas vers sa liberté. Mais au moment de sa naissance, une sage-femme nommée Madeleine avait veillé sur son berceau. Tout en marchant sur le sentier face à la mer, Archie découvre les carnets de Madeleine ; ses confidences et ses secrets. La plume d’Alia Cardyn est à la fois poétique et émouvante. En nous racontant l’histoire d’Archie, cette auteure belge déploie une palette d’émotions dont certaines touchent au cœur. Bon moment de lecture.
Long week-end. J. Maynard
Joyce Maynard est une auteure américaine à succès. La lecture de son best-seller « Là où vivaient les gens heureux » ne m’avait pas fait grand effet. Sur les conseils d’une amie, j’ai ensuite acheté un autre roman de la même auteure : « Long week-end ». Cette fois, nous sommes sur la côte Est des Etats-Unis ; l’été 87. A quelques jours de la rentrée scolaire, un garçon et sa mère font des courses. L’adolescent est le narrateur du roman et se prénomme Henry. Dans un rayon de supermarché, Henry rencontre Frank qui lui demande de l’aide car il est blessé. En réalité, Frank vient de s’évader de prison et il va passer le long week-end du Labor Day chez Henry qui habite avec sa mère, Adèle. Joyce Maynard a eu la bonne idée d’écrire cette fiction du point de vue d’Henry car cela procure une certaine fraicheur au roman. Pour notre plaisir de lecture, l’adolescent de treize ans livre ses sentiments et toutes ses émotions. Il aborde plusieurs thèmes dont le divorce de ses parents, ses premiers émois et son amour pour Adèle, cette mère fragile et instable. Pendant six jours, Frank, Henry et Adèle vont vivre un singulier huis clos ; une expérience inoubliable. Excellent moment de lecture.
Le mystère de la femme sans tête. M. Leroy
Voici une fiction perturbante. L’auteure belge, Myriam Leroy, retrace la terrible histoire de Marina Chafroff, une femme russe qui vivait en Belgique pendant la Seconde Guerre mondiale. C’est en se promenant au cimetière d’Ixelles que l’auteure découvre la tombe d’une jeune femme. Lorsqu’elle se penche sur la pierre de granit sombre, c’est le mot « décapitée » qui la bouleverse totalement. Sur internet, le visage lumineux de cette « femme sans tête » lui apparaît. Obsédée par Marina, l’auteure décide alors de retracer sa vie pour mieux comprendre son terrible destin ; Marina s’est dénoncée suite à un attentat rue Marnix, en 1941. Dès le début de son enquête, Myriam Leroy bute sur le doute : comment une si petite femme a t-elle pu attaquer un soldat nazi ? « Le mystère de la femme sans tête » plane tout au long de la lecture. Ce livre a pourtant le mérite de nous rappeler une histoire oubliée, celle d’une femme qui s’est sacrifiée pendant la guerre, à Bruxelles. D’après la lectrice, Myriam Leroy va trop loin lorsqu’elle nous parle de la famille toute entière de Marina. De plus, les allers-retours dans le temps pèsent au cours de la lecture. Finalement, même si le sujet chamboule la lectrice, la fiction est loin de convaincre.
Les lendemains. M. Da Costa
Grâce à une amie, j’ai découvert le deuxième roman de Mélissa Da Costa. Dès les premières pages, cette auteure française nous happe en nous coupant le souffle. Amande est l’héroïne de ce roman singulier et bouleversant. Suite au décès inopiné de son mari et de son bébé, la jeune femme s’isole dans une maison en Auvergne, au milieu de la nature. Au plus mal, Amande ne voit pas la vie s’épanouir au jardin et rejette le chat qui rôde autour de la maison. Mais un jour, intriguée par des annotations de l’ancienne propriétaire, Amande tente de redonner vie au potager et reproduit même quelques recettes. Lorsque la fille de l’ancienne propriétaire récupère des affaires dans la maison, Amande se lie d’amitié avec Julie. Sans le savoir, Julie va contribuer à sa reconstruction en aidant Amande à se projeter dans un futur. Si, chez mon libraire, j’ai trouvé le roman de Mélissa Da Costa classé dans la catégorie « feel good », je tiens à préciser que cette fiction n’est pas légère. Au contraire, véritable hymne à la renaissance et à la nature, ce roman captive et interpelle la lectrice jusqu’à la dernière page. Excellent moment de lecture.
Guetter l’aurore. J. Printzac
Ce roman nous replonge dans la période sombre de la Seconde Guerre Mondiale, en France. Tout commence en 2022, lorsque Deborah rentre vivre chez sa mère, après une rupture amoureuse. Dans la maison, Esther, la grand-mère de Deborah, séjourne également. Cette dernière perd de plus en plus souvent la tête, confond sa petite-fille avec une certaine Clara. Qui est Clara ? Intriguée, Deborah se décide à en savoir plus à propos du passé de sa famille juive. Quel a été le parcours de la famille Brodsky, réfugiée au pied des Pyrénées, pendant la guerre ? Deborah repart sur les traces de ses proches, découvre la grande maison délabrée de Saint-Girons et des lambeaux d’histoire. Adolescente, Esther était la fiancée de Marius. Qu’est-il devenu ? Finalement, Clara était la meilleure amie d’Esther. Rebelle, la jeune fille s’était engagée dans un mouvement de Résistance. Malheureusement, des collabos semaient la terreur à Saint-Girons. Avec force, Julie Printzac évoque la jeunesse et les convictions de ces français, prêts à sa battre pour leur pays. Entre fiction et documentaire, Julie Printzac restitue une histoire familiale bouleversante ; une histoire qu’elle porte en elle. Bon moment de lecture.
Fuir l’Eden. O. Dorchamps
Sur les conseils de ma libraire, j’ai découvert ce roman singulier qui offre une palette d’émotions. La couverture du livre représente L’Eden, une cité brutaliste de la banlieue de Londres où règne la violence. Dans cette barre d’immeuble en béton, Adam vit avec ses parents et sa petite sœur, Lauren. Le père, surnommé « l’autre » par Adam, frappe allègrement la mère de famille. Un jour, la mère disparaît en laissant, derrière elle, une lettre. D’après « l’autre », elle serait partie en Espagne avec son amant, abandonnant le foyer. Adam et Lauren encaissent, survivent dans la cité en compagnie de ce père alcoolique et brutal. Toujours à court d’argent, Adam fait la lecture à une dame aveugle qui lui sert de mère de substitution. Jusqu’au jour où Adam sauve de justesse une jeune fille sur le quai de l’express. Alors, l’amour devient une quête pour Adam, un adolescent fragile, sensible et attachant. Auteur franco-britannique, Olivier Dorchamps nous embarque totalement dans ce roman social. Son univers singulier accapare l’attention de la lectrice qui retrouve le style de Bruno Masi et la misère sociale des films de Ken Loach. Au fil de cette fiction contemporaine, l’espoir surgit parfois entre les lignes. Excellent moment de lecture. Prix des lecteurs de la Maison du Livre. Prix Louis-Guilloux.
Mon mari. M. Ventura
Chaque lectrice retrouvera une part d’elle même dans ce premier roman très réussi. Amoureuse folle de son mari, la narratrice nous raconte sa vie quotidienne et son obsession pour son homme ; du lundi au dimanche. Depuis quinze ans, l’héroïne s’inquiète en permanence pour son mariage, vit dans l’angoisse d’une éventuelle séparation malgré un amour partagé. En cachette, elle accède à la messagerie de son époux, note dans un carnet les comportements suspects, ses réflexions et ses doutes. Pour notre plaisir de lecture, cette traductrice et mère de deux enfants, joue un rôle sans discontinuer. Inspirée par le sentiment amoureux, Maud Ventura s’amuse à caricaturer la dépendance féminine et la passion, à l’extrême. Jubilatoire, ce roman à suspense se lit avec délice. Excellent moment de lecture. Prix du premier roman.
Un été français. Ch. Moguérou
Christian Moguérou est né à La Rochelle, au cours de l’été 1968. Dans ce roman dense, il nous parle de cette haute saison où la plage grouille de monde, juste avant l’heure de l’apéro. Pieds nus dans sa cabane du Cap-Ferret, le journaliste dévore tant de livres qu’ils sont devenus des meubles à force d’exister. Face au Bassin, le voici qui écrit à propos de ses étés passés en France. Au fil des pages, l’auteur livre ses souvenirs d’enfance, évoque le vestige de ses amours et la trace de ses amis dans le sable en attendant la venue de Louise, Luigi et Gabriel. Erudit, l’auteur se réfère continuellement à la littérature, cite Henry Miller, Lawrence Durrell, Christian Bobin et tant d’autres. Artiste sensible, il fait aussi référence à de nombreux films et une bande-son singulière. A la fois inspiré et passionné, ce narrateur contemporain nous offre une réflexion sur ce que représente l’été français des juilletistes et des aoûtiens en s’appuyant sur sa propre définition. Pour la lectrice, ces mots baignés de soleil dégagent une certaine poésie. Au détour des phrases, elle imagine parfaitement une fin d’été face à ce Bassin qui hésite entre grisaille chinée et soleil timide. Le cœur entre deux rives, Christian Moguérou s’égare souvent au cours de son épopée estivale, laisse dérouler son imagination fertile pour notre plaisir de lecture. Amoureux des femmes et épicurien, il dévore la vie en espérant que l’été se souviendra de lui. Bon moment de lecture.
Blizzard. M. Vingtras
Marie Vingtras a reçu une multitude de prix littéraires pour ce premier roman choral efficace. Nous sommes en Alaska, la tempête de neige se prépare. Benedict a allumé un feu dans la cheminée, il est seul dans la maison qui craque et gémit. La femme qui s’occupe de son fils, Bess, est sortie avec le petit. Mais Bess a lâché sa main quelques instants et l’enfant a disparu dans le blizzard. L’alerte est vite donnée et les proches de Benedict se lancent à la recherche du garçon en raquettes et motoneige. Rapidement, une course contre la mort s’engage. Alors que le blizzard souffle, quatre personnages s’expriment à tour de rôle. Chacun dévoile son passé, sa vérité et quelques secrets. Le style de la fiction est incisif et maîtrisé. Les phrases sont courtes car l’auteure cherche d’abord à raconter. Puis, au fil de courts chapitres, le rythme s’accélère. Le suspens est pourtant maintenu jusqu’à la fin même si les éléments distillés, tout au long de l’intrigue, sont abondants. Ce huis clos à ciel ouvert se révèle digne d’un thriller nord-américain où les thèmes de la culpabilité et de la paternité émergent. Bon moment de lecture.
La Californie. B. Masi
C’est le ton du roman qui donne une saveur singulière à cette lecture. Bruno Masi nous raconte l’adolescence désenchantée de Marcus, né de père inconnu. La fiction se déroule dans une cité balnéaire française entre mer et béton. La mère, Annie, est partie depuis quelques temps, laissant Marcus et son demi frère, violent, seuls dans un appartement miteux. Sous le soleil des vacances, Marcus s’ennuie, s’amuse avec son copain Virgile, embrasse une fille et rêve de la Californie en regardant les voitures passer sur l’autoroute. La solitude, l’ennui et l’abandon sont les thèmes de ce roman très touchant et bien écrit. Bruno Masi raconte le temps des premières fois pour Marcus, ce garçon délaissé qui garde, au plus profond de lui, l’espoir de retrouver sa mère. La lectrice aime l’atmosphère particulière des années 80 et une bande son familière qui ravivent souvenirs et émotions. Prix Marcel Pagnol. Excellent moment de lecture.
Du temps de ma splendeur. A. Djian
Ne vous fiez pas à la quatrième de couverture du premier roman d’Aurélie Djian. Loin du roman moralisateur, cette fiction traite avec un certain humour d’une relation mère-fille-grand-mère. Au cours de son éducation, la narratrice se retrouve tiraillée entre ces deux modèles : une mère qui règne en Reine (son prénom) et Rose, une grand-mère aimante. Méditerranéenne, juive séfarade, Reine est une ancienne beauté, blessée par un divorce humiliant dont elle ne se remettra jamais. Dans une ambiance post divorce chaotique, la narratrice grandit aux côtés de cette mère toxique qui refuse de vieillir. Blessée, la narratrice trouve du réconfort auprès de Rose, sa grand-mère protectrice, romantique et bienveillante. Malgré le divorce, la fille maintient une relation avec son père. Son amour pour sa fille, ses confidences et son désarroi face à la maladie touchent la lectrice. Belle comme sa mère, la narratrice va ensuite collectionner les amants dont beaucoup d’hommes mariés. Certaines lectrices se retrouveront dans ce roman aux accents biographiques. Le style d’Aurélie Djian est singulier et touchant ; sa plume semble imbibée par une forme de sincérité. Ce qui réjouit la lectrice, ce sont notamment les longues listes poétiques qui se rapportent à ses amours mais qui, parfois, déroutent la lecture. Teinté de cynisme, ce roman d’apprentissage retrace, avec originalité, une éducation sexuelle et sentimentale. Excellent moment de lecture.
Vivre vite. B. Giraud
Brigitte Giraud vient de remporter le prestigieux Prix Goncourt grâce à ce récit qui se lit à toute vitesse. Vingt-ans après la disparition de son mari, Claude, dans un accident de moto à Lyon, Brigitte Giraud refait l’histoire, décortique la mécanique du drame pour enfin tenter de comprendre. A la recherche de la vérité, Brigitte Giraud a choisi de construire son récit sur la base de différentes hypothèses, des « si », des questions restées sans réponse. Et si la narratrice avait téléphoné à Claude la veille ? Et si Claude n’avait pas pris la moto sans autorisation ? Et si elle avait eu un portable ? Au fil des pages, la lectrice entre dans la vie de ce couple ressuscité, passionné de musique, à une époque où internet n’existait pas. Au cours de sa lecture, la lectrice découvre le personnage de Claude, ce qu’il aimait, ce qu’il écoutait, sa dernière journée ; un compte à rebours macabre. L’écriture de Brigitte Giraud semble familière, passionnante et émouvante dans sa quête de sens, de signes du destin suite à la perte de l’être cher. Malgré la multitude de petits détails, l’auteure livre avec pudeur ses sentiments, sa culpabilité et son incommensurable chagrin. Finalement, chaque lectrice pourrait être cette narratrice ; une femme frappée par le drame. Par sa façon de superposer l’imaginaire au réel, Brigitte Giraud nous offre un récit intime qui résonne. Excellent moment de lecture. Prix Goncourt 22.
Le lac au miroir. O. Lefranc
Connaissez-vous Bali ? Dans ce premier roman, Odile Lefranc crée un univers à la fois singulier et exotique qui plaît à la lectrice. Hannah Springer est la narratrice de cette fiction bien construite qui fait voyager de Bali, à Paris en passant par l’Allemagne. Avec talent, Odile Lefranc entremêle le passé et le présent tout en entretenant un certain suspense. Suite à une relation compliquée avec sa mère Magda, Hannah a claqué la porte de l’appartement familial, à l’âge de dix-huit ans. Vingt-ans plus tard, en vacances à Bali, Hannah apprend le décès brutal de sa mère et décide de se rendre illico à Paris. En effet, il est grand temps pour Hannah de reconstituer le passé familial, comprendre ses origines, découvrir enfin le nom de son père. En pénétrant dans l’appartement parisien, Hannah se souvient avec émotion d’un tableau qui a disparu au cours de son enfance : « Le lac au miroir ». Cette jolie toile est une œuvre de Walter Spies, un peintre allemand exilé à Bali, un siècle plus tôt. En enquêtant en Allemagne, Hannah va alors découvrir un lien avec le peintre, le passé trouble de son grand-père et les secrets bien gardés de sa défunte mère. Au fil des pages, Odile Lefranc rend un bel hommage à Walter Spies, reconstitue sa vie mouvementée sur l’île volcanique. La lectrice se passionne pour la quête de vérité d’Hannah, son besoin de réparer et son désir de femme. Grâce à la poésie qui se dégage du roman, la lectrice entrevoit la beauté de l’île de Bali, sa lumière et ses paysages d’où s’élève le son du gamelan. Bon moment de lecture.
GPS. Lucie Rico
Le dernier roman de Lucie Rico nous propulse dans une autre dimension. C’est d’abord l’originalité de cette fiction qui surprend la lectrice. Voici le pitch : journaliste de faits divers au chômage, Ariane traîne chez elle sans grande motivation. Le jour où Sandrine l’invite à ses fiançailles, elle partage avec son amie sa position GPS afin de l’aider à trouver l’endroit. Mais, au lendemain des fiançailles, Sandrine disparaît mystérieusement. Grâce à sa géolocalisation, Ariane va suivre désespérément son amie en scrutant le petit point rouge sur l’écran de son portable. Ecrit à la deuxième personne du singulier, ce roman est décidemment très différent d’un roman classique. Malgré elle, Ariane devient spectatrice d’un polar dédié aux outils de technologies modernes comme le GPS, Google Maps, Street View ou Timelapse, en bouleversant allégrement notre rapport espace-temps. Au-delà de cet univers virtuel, Ariane éprouve des sentiments, des émotions sincères pour Sandrine ; un impossible deuil. Si au début de la lecture un doute s’installe, le roman finit par emporter la lectrice grâce à l’humour, la singularité et le cynisme de Lucie Rico. Finalement, cette fiction à suspense a le grand mérite de nous questionner à propos du monde virtuel et de ses limites. Prix Wepler 2022. Bon moment de lecture.
Celle que vous croyez. C. Laurens
Publié en 2016, ce roman de Camille Laurens a été brillamment adapté au cinéma. Dans le rôle principal du film, Juliette Binoche crève l’écran. A la fois féroce et intelligent, le scénario est bien construit et la musique est d’une beauté bouleversante. Le film étant un coup de cœur, j’ai décidé de lire le roman que j’ai trouvé différent. L’autofiction de Camille Laurens aborde principalement le thème du désir féminin. Le roman mêle la réalité au mensonge tout en entremêlant les histoires de manière surprenante. Agée de 48 ans, Claire est une femme divorcée, amoureuse de Jo, son jeune amant. Lorsque Jo met fin à leur relation brutalement, Claire décide de créer un faux profil sur « Facebook » afin de pouvoir le surveiller. Pensant qu’elle n’est plus désirable, Claire poste la photo d’une jeune femme sur le profil en se faisant passer pour « celle que vous croyez ». Grâce à cette fausse identité, Claire dialogue avec le colocataire de Jo dont elle tombe vite amoureuse. Manipulé, Chris (le colocataire) la désire intensément et la pousse à le rencontrer. La manipulation de Claire l’oblige à jongler avec le mensonge et à entretenir le suspense pour notre grand plaisir de lecture. Contrairement au film, le roman nous offre plusieurs points de vue : celui de Claire, celle de son psychiatre, celui d’une écrivaine et, en épilogue, le point de vue du mari de Claire. Le style et le ton du roman sont différents du film et la prose parasite légèrement la lecture. Finalement, cette fiction géniale nous donne matière à réfléchir à propos de la machine à fantasmes que représente « Facebook ». En bonus, Camille Laurens nous offre une réflexion sur le travail d’une écrivaine. Excellent moment de lecture.
Mr Wilder et moi. J. Coe
Jonathan Coe est un écrivain britannique prolifique. J’ai adoré plusieurs de ses livres dont « Expo 58 » qui se déroule à Bruxelles. Dans son dernier roman (21), Jonathan Coe remonte une nouvelle fois le temps. Nous sommes à la fin des années 70, en été, lorsque deux jeunes amies grecques font le tour des Etats-Unis. Du côté de Los Angeles, les deux jeunes femmes finissent par se séparer. L’une d’elles se prénomme Calista. Par un heureux hasard, la jeune touriste se retrouve à la table d’un cinéaste hollywoodien, le célèbre Billy Wilder dont elle ne sait rien. Grâce à cette rencontre, Calista prend ses fonctions d’interprète sur le film « Fedora », tourné en Grèce. D’ailleurs, ce tournage marquera le début de sa carrière dans l’univers du cinéma, aux côtés de Mr Wilder. A travers ce thème, Jonathan Coe rend un vibrant hommage à ce cinéaste américain et donne envie de visionner ses films. Personnage attachant, Calista mène sa petite vie et passionne tout autant la lectrice. En réalité, la première partie du roman captive par les références cinéphiles et les dialogues qui sont magnifiquement bien écrits. Malheureusement, le rythme de la fiction se casse lors du tournage à Berlin, lors de la lecture du scénario. Heureusement, le rythme repart lorsque Calista se retrouve à Paris, vingt-ans plus tard. Le talent de Jonathan Coe reste intact. Son style singulier est toujours empreint d’une bonne dose d’humour, de cynisme et d’une certaine élégance. Bon moment de lecture.
Une amitié S. Avallone
Le dernier roman de Silvia Avallone raconte « une amitié » entre deux adolescentes au début des années deux mille, au moment de l’avènement d’internet et des réseaux sociaux. Elisa, la narratrice, retrouve le journal intime de son adolescence, une période où tout semble possible. Entre les pages de son journal, un polaroïd décoloré s’échappe : l’émouvant portrait d’Elisa et de Béatrice. Emue, Elisa revient sur les traces de cette amitié douloureuse, l’énigme de Béatrice Rossetti. Une petite ville italienne de province sert de décor à leur rencontre ; un lycée face à la mer. Elisa est une jeune fille discrète, toujours attifée comme un as de pique. Complexée, elle grandit dans une famille modeste avec une mère dysfonctionnelle qui quitte brutalement son père. Alors, Elisa grandit aux côtés de ce père dépressif, loin de sa mère. Pour se consoler, Elisa se réfugie dans la littérature, à travers de nombreuses lectures dont « Mensonge et sortilège » d’Elsa Morante. Béatrice est tout le contraire d’Elisa, une jeune fille extravertie, jolie et gâtée. La littérature l’ennuie, Béatrice est du genre futile et frivole. Un vol dans un magasin va sceller le début de leur improbable amitié ; pour le meilleur et pour le pire. Finalement, Béatrice mène souvent la danse, exerce une sorte de manipulation sur Elisa qui la jalouse tout en l’admirant. Au moment où internet émerge en Italie, Béatrice devient une influenceuse très suivie. Mais après cinq ans d’amitié, treize années de brouille vont les séparer. Avec talent, Silvia Avallone explore des thèmes universels comme celui de la fraternité, la famille, la maternité, les premiers émois…C’est le reflet de cette amitié singulière et le style vif de Silvia Avallone qui séduisent la lectrice. Lecture coup de cœur.
P’tite hirondelle D. Zachary
Dominique Zachary est un journaliste belge, auteur de nombreux ouvrages. C’est un fait divers éminemment poétique qui ouvre les pages de son dernier roman : le sauvetage d’hirondelles surprises par une tempête de neige dans les Alpes. En 1913, les moines d’un monastère avaient ouvert portes et fenêtres afin de secourir les oiseaux frigorifiés ; offrir leur hospitalité. Mais une autre belle surprise attend la lectrice. La préface de « P’tite hirondelle » est signée de la main de Yasmina Khadra qui a aimé ce conte. Pour la lectrice, il s’agit aussi d’une fable écologique mettant en lumière l’homme, la nature et les hirondelles. D’ailleurs, l’oiseau sert de fil rouge en survolant les pages du roman. Dominique Zachary nous raconte l’histoire touchante de Mécanette et de sa fille adoptive, Finette. L’orpheline s’appelle en réalité Myao Kaung ce qui signifie « La fille de l’hirondelle ». Dans un pays lointain, la petite fille vivait déjà dans une maison peuplée d’hirondelles. Ensemble, Mécanette et Finette vont défendre la cause des oiseaux afin qu’ils puissent continuer à survoler leur village du sud-ouest de la France. Grâce à sa jolie plume, Dominique Zachary nous parle de loyauté, d’amitié et d’amour. Au fil de la lecture, la lectrice ne se lasse pas de découvrir de magnifiques citations et textes courts dont le ravissant « chant du merle » de Vinciane Despret ; une autre compatriote. Bon moment de lecture.
HHhH. L. Binet
Voici un roman singulier, récompensé pour son originalité mais aussi sujet à polémique. Publié en 2010, le premier roman de Laurent Binet fait aujourd’hui partie du programme de terminale. Le titre signifie : « Himmlers Hirn Heibt Heydrich » soit « Le cerveau d’Himmler s’appelle Heydrich. » Mais qui était Heydrich ? SS allemand sanguinaire, Reinhard Heydrich a joué un rôle majeur dans l’organisation de la Shoah. Professeur de français, Laurent Binet souhaitait axer son roman sur l’opération « Anthropoïd », un attentat visant à liquider Heydrich, à Prague en 1942. Pourtant, tout au long de la reconstitution de l’opération de résistance, Laurent Binet avoue avoir été « impressionné » par le personnage d’Heydrich. Finalement, celui qu’Hitler surnommait « L’homme au cœur de fer », prend la place de personnage principal dans le récit. Pour la lectrice, c’est ici que le bât blesse : pourquoi mettre en lumière un personnage aussi ignoble au lieu de se focaliser sur les protagonistes de l’opération « Anthropoïd » ? D’un autre côté, la lectrice salue le travail de recherche de Laurent Binet car les scènes, dialogues ou informations ont été soigneusement vérifiés dans les archives. Au fil de son écriture, l’auteur fait part de ses doutes d’écrivain, apostrophe la lectrice tout en se référant à Shakespeare, Flaubert ou Houellebecq. Grâce à sa rigueur, Laurent Binet parvient à décortiquer la montée du nazisme et son mécanisme, au plus près de la vérité historique. Finalement, ce roman a le mérite de servir de manuel d’histoire. Prix Goncourt du Premier Roman.
Quand tu écouteras cette chanson. L. Lafon
Cette collection « Ma nuit au Musée » (Stock) est une belle découverte. J’ai tellement aimé « Le parfum des fleurs la nuit » par Leïla Slimani, dans la même collection, que je garde le livre près de moi. Cette fois, c’est Lola Lafon qui nous parle de son choix : une nuit au Musée Anne Frank, à Amsterdam. L’écrivaine française a évité la question de la judaïté dans ses romans précédents mais elle a souvent donné la parole aux adolescentes comme dans « La petite communiste qui ne souriait jamais », « Mercy, Mary, Patty » ou « Chavirer ». Depuis des décennies, « Le journal d’Anne Frank » est mondialement connu mais qui le connaît vraiment ? Lola Lafon s’offusque de la manipulation du journal avant d’entrer à petits pas dans le musée tant elle a peur de profaner la mémoire de cette jeune auteure, morte dans un camp de concentration. De son côté, la lectrice est impatiente de découvrir le regard que porte Lola Lafon sur l’Annexe où, pendant plus de deux ans, huit personnes ont vécu clandestinement. L’Annexe est désormais un musée vide qui témoigne, avant tout, de l’absence. Tout au long de la nuit qui s’étire, Lola Lafon livre une expérience intellectuelle singulière où il est question de peur, d’exil, d’extermination. La lectrice découvre une auteure à fleur de peau, intelligente et touchante qui se dévoile à travers son histoire personnelle jusqu’à cette chanson qu’elle n’arrive plus à écouter. Excellent moment de lecture.
Où vivaient les gens heureux. J. Maynard
Le dernier roman de Joyce Maynard est un best-seller américain. En débutant la lecture, je dois avouer que la première partie du livre me tombait littéralement des mains tant il était empreint de bons sentiments. Pourtant, Joyce Maynard a été récompensée par quelques prix littéraires en France. Beaucoup de lectrices et de lecteurs se sont retrouvés dans cette histoire familiale américaine : une rencontre amoureuse, l’achat d’une maison, les enfants, la vie professionnelle, l’adultère, le divorce…Tout commence par une enfance malheureuse et une adolescence endeuillée par la mort des parents d’Eleanor. La rencontre avec Cam bouleverse la vie de la jeune femme qui devient mère de famille. Bien sûr, le couple connaît des moments de bonheur, de joie et de colère aux côtés de leurs trois enfants : Toby, Ursula et Alison. Ensemble, ils habitent dans une charmante ferme du New Hampshire. Auteure et illustratrice, Eleanor pourvoit principalement aux besoins de la famille. Tout semble parfait dans le meilleur des mondes, jusqu’au jour où Toby manque de se noyer. Quelques semaines plus tard, Eleanor découvre la liaison de Cam avec Coco, la baby-sitter. Le rêve d’Eleanor s’écroule. Afin de protéger ses enfants et de ne pas dire du mal de leur père, Eleanor décide de quitter le foyer sans exprimer les raisons de la rupture. Au fil des pages, l’identification à la vie de cette femme est de plus en plus évidente car Joyce Maynard a particulièrement bien construit son récit, les caractères de ses personnages et les montagnes d’émotions. La lectrice se repère dans le temps grâce aux évènements américains comme la conquête spatiale, l’épidémie du sida, la mort de John Lennon puis celle de Mickael Jackson….Finalement, ce roman axé sur l’amour, les enfants et le pardon, se révèle poignant. Bon moment de lecture. Grand Prix de littérature américaine, Grand Prix de l’héroïne « Madame Figaro », Prix Samantha.
Les envolés. E. Kern
Etienne Kern rend, ici, hommage à un homme au destin surprenant : Franz Reichelt. Tailleur pour dames à Paris, Franz Reichelt avait un rêve : confectionner un parachute performant aux prémices de l’histoire de l’aviation. Malgré des premiers essais négatifs, l’inventeur loufoque saute du premier étage de la tour Eiffel, un matin de février 1912, pour tenter de valider son prototype. C’est en visionnant les images de cet incroyable saut dans le vide qu’Etienne Kern a décidé d’écrire ce joli roman qui offre une palette d’émotions ; angoisse, peur et espoir. Au fil de son écriture, le passé vient le hanter : la mort d’un grand-père et d’une amie, tombés dans le vide. Ces personnages, Etienne Kern les baptise : « Les envolés ». Ce roman poétique a été très justement récompensé par le Goncourt du premier roman, un envol poétique et passionné. Excellent moment de lecture.
Nos mères. A. Wauters
J’avais envie de découvrir l’écriture d’Antoine Wauters, l’écrivain compatriote. Lauréat de nombreux Prix littéraires, Antoine Wauters a publié ce petit roman en 2014. Quelque part, sous les bombes du Proche-Orient, Jean vit aux côtés d’une mère pleine de contradictions, à la fois aimante et brutale. Le père de Jean a été tué à la guerre. Sa veuve, embourbée dans un passé rempli de chagrin et de colère, va tenter de protéger son fils en l’enfermant au grenier. Finalement, afin de lui assurer un avenir meilleur, Jean est adopté en Belgique par une nouvelle maman. Mais le monde de cet enfant s’est écroulé et sa nouvelle vie se révèle tout aussi chaotique. Antoine Wauters traite ici de la difficulté des femmes à élever des enfants qu’elles soient dans un pays en guerre ou prisonnière d’une guerre intérieure. Il est aussi question de la souffrance d’un enfant qui tente de vivre malgré l’exil et l’abandon. Le rythme du roman est saccadé par des souvenirs, des citations, des résolutions…Au fil de la lecture, la sensibilité de l’auteur transparaît derrière la poésie des mots. Bon moment de lecture.
Maïmaï, l’ombre du chardon. A. Shimazaki
Mon père est mort au début du mois de juillet. Pendant mon deuil, il me fallait une lecture apaisée, un dépaysement immédiat. J’ai donc choisi un roman d’Aki Shimazaki, auteure à succès d’origine japonaise. « Maïmaï » fait partie d’un cycle romanesque de trois volumes. C’est sa couverture qui m’a tout de suite intriguée : un escargot sur un fruit de physalis. Tarô est le narrateur de cette fiction qui se déroule au Japon, au début de l’été. Le jeune homme sourd et muet se retrouve brusquement orphelin suite au décès inopiné de sa mère, la propriétaire de la librairie Kitô. Proche de sa grand-mère, Tarô va, au fil de la succession, découvrir quelques surprenants secrets de famille. « Maïmaï » signifie escargot en japonais et représente un symbole dans cette fiction qui nous éclaire un peu plus sur la société traditionnelle japonaise, ses coutumes et ses mœurs. Par son écriture simple, poétique et imagée, l’auteure nous enseigne à quel point chaque chose a un sens dans la vie. Un récit au style fluide et épuré qui assure le dépaysement et apporte une forme de réconfort, une harmonie. Excellent moment de lecture.
Broadway F. Caro
Je vous conseille de lire ce petit roman particulièrement drôle pendant un voyage en train ou en avion. Ecrivain à succès, Fabrice Caro est également auteur de bandes dessinées, ce qui explique son don pour décortiquer en séquences une vie familiale banale. Axel est le narrateur de cette fiction désopilante. Après avoir reçu la fameuse enveloppe bleue de dépistage du cancer colorectal, Axel s’inquiète et devient parano. Père de famille, il a l’art de s’interroger, de remettre en question le comportement de ses enfants ou ses relations de voisinage sans pouvoir réagir de manière appropriée. Un jour, le proviseur du collège de son fils le convoque afin de lui montrer un dessin salace…Chaque lecteur/lectrice se retrouvera dans les réflexions de ce père de famille dépassé par les événements et tellement représentatif de notre société. Un roman tragi-comique à lire pour vaincre l’angoisse. Lecture coup de cœur.
Le messager. L.P. Hartley
Ce roman d’apprentissage nous plonge dans le monde aristocratique anglais. Devenu un homme âgé, Léon se souvient de vacances singulières dans le Norfolk, en 1900. Cet été là, le jeune garçon est invité à la campagne par un copain de classe aristocrate. Issu d’un milieu modeste, Léon cherche ses marques tout en apprenant la vie de château ; un univers codé et singulier. Admiratif et amoureux de la sœur de son copain de classe, Léon accepte de rendre service à Marian et devient, malgré lui, son « messager ». En secret, Léon porte des lettres au fermier du coin, Ted Burgess. Au fil de la lecture, la lectrice découvre toute la naïveté et l’incompréhension de ce jeune garçon qui se retrouve coincé dans un triangle amoureux ; spectateur impuissant. D’après la lectrice, le roman comporte parfois quelques longueurs notamment lors des parties de cricket. Finalement, Leslie Poles Hartley mêle habilement suspense et sentiments dans cette fiction surannée et dramatique. Bon moment de lecture.
Le dernier été en ville. G. Calligarich
Publié pour la première fois en 1973, ce roman italien dévoile l’élégance surannée d’une époque ; les années soixante. Gianfranco Calligarich nous conte une histoire d’amour désenchantée qui se passe le temps d’un été, à Rome. Le narrateur se nomme Léo. Antihéros et journaliste trentenaire, Léo vit au sein de la société romaine avec laquelle il se sent souvent en décalage. Lors d’une soirée mondaine, il rencontre Arianna, une belle femme au parfum de lilas. Tombé sous le charme de cette italienne frivole et décomplexée, Léo entame une histoire en pointillé avec Arianna. A travers cette passion incandescente, son amour pour la mer et pour Rome, le personnage de Léo exprime, au fil des pages, une mélancolie contagieuse, presque palpable. Au cours du récit, le narrateur lit et boit beaucoup, ne quitte pas sa vieille Alfa Roméo et croise des gens de toute sorte, eux aussi cabossés par la vie. Teintée d’humour, l’écriture sensible, sarcastique et poétique de Gianfranco Calligarich finit par toucher au cœur la lectrice. Excellent moment de lecture.
Les enfants de la nuit. E. Ionesco
Eva Ionesco nous offre un roman à la fois troublant et romanesque, celui de son adolescence parisienne chaotique, à la fin des années 70. A l’époque, la mère d’Eva est connue dans la capitale pour avoir réalisé des portraits pornographiques de sa fille, ruinant au passage son enfance, son amour et sa confiance. Mais depuis qu’Eva ne fréquente plus l’école, les services sociaux enquêtent, spéculent sur son avenir. En attendant la décision du juge, Eva fugue, découche et s’amuse follement. Icône du Palace, la jolie adolescente évolue avec sa bande d’amis ; oiseaux de nuit au milieu des célébrités. Sur fond culturel et dans un style trash, Eva raconte ses sorties déjantées, sa rage et sa débauche : prostitution, drogue, vol et mensonges. Au fil des chapitres, la lectrice ressent la vulnérabilité d’une enfant propulsée trop tôt dans le monde des adultes et qui frôle parfois la mort au moment de ses premières fois. Atypique, ce roman explore la vie et la sexualité d’une enfant égarée, évanouie dans la nuit parisienne, irrémédiablement blessée. Excellent moment de lecture.