Si l’expression « roman coup de poing » ne signifie rien pour vous, la lecture de ce livre pourrait vous éclairer. Adeline Dieudonné est une auteure belge au succès fulgurant comme sa plume. Elle raconte une histoire universelle, un conte, qui tient en haleine jusqu’à la dernière page. La narratrice est une petite fille de dix ans. Elle vit au milieu de la campagne wallonne dans une maison avec quatre chambres: la sienne, celle de son petit frère Gilles, celle des parents et celle des animaux empaillés; trophées de chasse du père à la carrure d’équarrisseur, passionné de télé et de whisky. La mère de famille est inexistante, soumise à la brutalité de son mari qui tape sur elle comme sur un « punching ball ». Les deux enfants évoluent, complices et innocents, dans cet univers glauque. Un jour pas comme les autres, un accident ampute brutalement Gilles de son sourire. Confrontée à une réalité qui la dépasse, notre narratrice décide de tout entreprendre pour rendre à son frère sa joie d’enfant… Il y a beaucoup d’amour, de tendresse et d’ironie dans ce roman marqué du sceau de la culture belge. Adeline Dieudonné se révèle audacieuse, entière, et franche; une révélation. Excellent moment de lecture. Prix du Roman Fnac 2018. Prix Filigranes 2018.
Archives de l’auteur : Sophie Marie Dumont
La Maison Golden. S. Rushdie
Ne vous fiez pas à la couverture colorée du treizième roman de Salman Rushdie, ce n’est pas un roman joyeux. Né en Inde, l’auteur érudit des « Versets Sataniques » vient d’adopter la nationalité américaine. La fiction, dont le thème central est celui de l’identité, se déroule à New York. Notre narrateur est un jeune homme belge (!), René Unterlinden, qui souhaite devenir cinéaste. Habitant de Greenwich Village, René fait la connaissance de ses nouveaux voisins indiens : un millionnaire énigmatique prénommé Néron et ses fils Apu, Petya ainsi que Dionysos; la famille Golden. René va peu à peu découvrir pourquoi cette famille a subitement quitté l’Inde et qui est le patriarche. Malheureusement, en se rapprochant de la famille Golden, René va tomber dans le piège tendu par la nouvelle femme de Néron; une femme venimeuse, manipulatrice et vénale. L’intrigue est passionnante mais la lectrice se trouve constamment confrontée à l’actualité, aux pensées de René et à toutes sortes de références cinématographiques, littéraires, historiques et mythologiques. Si vous n’avez pas lu l’équivalent d’une bibliothèque de quartier (et ses dictionnaires), la lecture pourrait s’avérer compliquée. Cependant, ce roman, en lien avec la tragédie grecque, s’intéresse à la question du mal dans un style à la fois drôle, ironique et tragique. Peut-on être quelqu’un de bien et trahir ? Un roman à suspense qui questionne l’Amérique d’aujourd’hui. Bon moment de lecture.
C’est moi qui l’ai écrit! L. Ortegat
J’ai rencontré Laurence Ortegat dans le cadre du concours « Fintro, écritures noires » de Bruxelles. En tant que finaliste du concours, j’ai pu bénéficier des précieux conseils de ce coach d’auteurs belge. Ecrire un livre est un grand projet et, parfois, l’auteur néglige ses droits. Heureusement, Laurence connaît parfaitement les rouages du milieu de l’édition en France et en Belgique. Fondatrice de « la Compagnie de Lecteurs et Auteurs », elle accompagne le futur écrivain, offre son regard sur le texte et donne des pistes pour l’améliorer; des conseils adaptés à chaque projet. Dans son livre, Laurence livre sa méthode des « 6R » pour aller jusqu’au bout d’un projet d’écriture en détaillant les différentes étapes de la chaîne du livre: de l’auteur au lecteur. Une approche avisée à consulter si, vous aussi, vous rêvez d’écrire un livre.
Avec toutes mes sympathies. O. de Lamberterie
Dans ce premier roman, Olivia de Lamberterie rend un hommage poignant à son frère disparu. Expatrié à Montréal, Alex s’est donné la mort à 46 ans, en octobre 2015. La journaliste et critique littéraire, au magazine « Elle », nous dévoile sa douleur tout en essayant de comprendre l’ultime choix de son frère. Au fil des pages, elle ne cesse de le chercher : « Où es-tu, mon frère terrible? » tout en guettant le moindre signe. Avec compassion, la lectrice découvre l’étendue du chagrin d’Olivia, ses questionnements, ses espoirs, ses peurs, ses souvenirs… Comment un homme qui a tout pour être heureux (d’après notre société) peut-il être malheureux au point d’en finir ? L’auteure refait le chemin à l’envers, nous parle d’elle même et de son amour absolu pour Alex, ce garçon joyeux, confident et complice de leur enfance privilégiée dans les beaux quartiers de Paris. Le désespoir est-il un héritage? Derrière son air de fille sage, Olivia de Lamberterie se rebelle, rend des comptes, écrit des mots à l’encre de son cœur; des mots empreints de colère, de révolte, d’espérance et d’amour. Bon moment de lecture.
Vie de David Hockney. C. Cusset
David Hockney est né en 1937 dans le nord de l’Angleterre. Petit garçon joyeux, artiste dans l’âme, il a toujours aimé dessiner. Son talent et son audace lui permettent de pousser les portes du Collège royal de Londres où David Hockney découvre l’Art et l’homosexualité. D’ailleurs, l’artiste ne cessera jamais de mêler sa vie privée à son oeuvre (Love paintings, Mr and Mrs Clark and Percy…). Influencé par le cubisme, admiratif de Picasso, David Hockney s’intéresse à la théorie de la perspective inversée. Ses tableaux rencontrent un succès grandissant et s’exposent entre Londres et les Etats-Unis où il réside fréquemment. En Californie, il se focalise sur les piscines (a bigger splash), et sa nature luxuriante loin des petits jardins anglais. Petit à petit, le style Hockney s’impose et se renouvelle malgré la critique qui ne le suit pas toujours. Confronté aux années sida et à la perte de nombreux proches, le peintre va donner une place de plus en plus importante à la lumière et aux couleurs dans ses œuvres. Curieusement, Catherine Cusset n’a jamais rencontré David Hockney et pourtant elle assure que « tous les faits sont vrais ». A partir d’archives, interviews, essais, catalogues, l’auteure a reconstitué le puzzle de la vie de l’artiste. Entre les lignes, l’écrivaine s’intéresse particulièrement à la question du désir et de la liberté. D’où vient le don de l’artiste ? Quel est le rôle de la critique ? En publiant un roman proche de la biographie, Catherine Cusset nous donne sa vision du célèbre peintre anglais. Prix Anaïs Nin 2018. Bon moment de lecture.
Agatha Raisin. Sale temps pour les sorcières. M.C. Beaton
Le tome 9 de cette série anglaise est à l’image d’Agatha Raisin : excentrique. Cette fois, notre détective se cache au « Garden hotel », sur la côte anglaise. Pourquoi? Agatha a été shampouinée à la crème dépilatoire par une coiffeuse rancunière. Presque chauve et toujours en manque d’amour, elle fréquente un groupe de résidents de l’hôtel puis consulte une sorcière réputée pour ses philtres. Malheureusement, la sorcière est subitement assassinée et Agatha Raisin se trouve en mauvaise posture… Une nouvelle enquête loufoque. Effet addictif. Bon moment de lecture.
Agatha Raisin. L’enfer de l’amour. M.C. Beaton
Série culte en France, Agatha Raisin séduit beaucoup de lecteurs même si ce n’est pas de la grande littérature. Plongez-vous avec gaieté dans cette enquête trépidante où il est aussi question d’amour. Anti-héroïne par excellence, la quinquagénaire anglaise a, une nouvelle fois, le chic pour se fourrer dans des situations délicates. A peine mariée à James, Agatha va vivre un véritable enfer: infidélités, mensonges, disparitions et meurtres ! Un tome (11) à lire n’importe tout (si possible dans l’ordre). A consommer sans modération. Bon moment de lecture.
L’amie des jours en feu. E. Rasy
Elisabetta Rasy nous entraîne en Italie du Nord durant la Première Guerre mondiale. Alors que les troupes de l’armée italienne se confrontent violemment à celles de la coalition Autriche-Allemagne, Maria Rosa et Eugenia se démènent comme infirmières volontaires dans un hôpital militaire proche du front. Au milieu des bombes, du sang, de la puanteur, de l’angoisse et de la mort, les deux jeunes femmes vont vivre une passion amoureuse interdite; étincelle au milieu des ténèbres. Tout au long de la lecture, la voix de Maria Rosa résonne entre les pages du roman. Sous la forme d’une longue correspondance, la jeune femme s’adresse à Eugenia pour lui déclarer son amour, faire revivre leur histoire. Inspirée par les journaux intimes d’infirmières bénévoles de la Grande Guerre, l’auteure a construit son roman comme un hymne à la vie, à l’amour et à la liberté d’aimer. Bon moment de lecture.
Betty, la nuit. M. De Van
Dans ce roman sombre, Marina De Van raconte la descente aux enfers d’une femme brutalement quittée par son mari. Fini l’épouse dévouée, mariée à un notable de province: tout s’effondre autour de Betty. En perte de repères, elle s’installe à Paris où elle ne connaît personne. Comment créer des liens ? Betty part à la rencontre de ses voisins mais sa conduite la précipite rapidement au-devant de graves ennuis. Si le style de l’auteure est convenu, le récit parvient à nous glisser dans un engrenage psychique singulier à la manière de Cate Blanchett dans le film « Blue Jasmine » ou de Betty dans le roman (et film) de Philippe Djian : « 37°,2 le matin ». Bon moment de lecture.
Gabriële. Anne et Claire Berest
En s’appuyant sur différentes archives, les deux arrière-petites-filles de Gabriële Buffet-Picabia font revivre leur ancêtre à travers ce travail de mémoire. Enfants, Anne et Claire Berest ignoraient tout de cette femme française si particulière, décédée à l’âge de 104 ans dans le silence complet. Théoricienne de l’art, muse et épouse du peintre Francis Picabia, Gabriële a vécu une vie romanesque, traversée par deux guerres, dans le tourbillon des mouvements artistiques du XXème siècle. Chaque chapitre du livre porte le titre d’une œuvre de Francis Picabia, peintre excessif et révolutionnaire. Ensorcelée par Francis, Gabriële renonce à son destin de compositrice mais certainement pas à son indépendance d’esprit et à sa liberté de femme. Le couple vivra une longue relation passionnée et destructrice. La bipolarité de Francis et les nombreuses grossesses seront les fardeaux de Gabriële qui devient la maîtresse de Marcel Duchamp et l’amie de Guillaume Appollinaire. En menant l’enquête, Anne et Claire Berest rendent hommage à une femme passionnée et amoureuse, une femme d’un autre siècle. Bon moment de lecture. Grand Prix de l’Héroïne 2018. Prix Grands Destins 2018.
Les enfants de Venise. L. Di Fulvio
Vous aimez vous évader grâce à la lecture? Le roman de Luca Di Fulvio ne vous décevra pas. Cette fiction captivante, riche en émotions et en rebondissements, nous projette en 1515 dans une Italie trouble pleine de misère, de vices, d’inquisiteurs et de courtisanes. L’imagination de l’auteur est tout simplement prodigieuse. Il fait évoluer une panoplie de personnages dans le décor de la mystérieuse Sérénissime, au XVIème siècle. Dans cette fresque romanesque, les enfants de Venise sont des petits voleurs de rue qui n’hésitent pas à se déguiser pour détrousser les passants. Ils se nomment Mercurio, Benedetta, Zolfo, Ercole….L’histoire débute à Rome où Mercurio commet un crime qui l’oblige à fuir du côté de Venise. Sur son chemin, il croise Isacco et sa fille Giuditta; son destin. Il est ici question de liberté, d’amour et de pureté des sentiments. Un roman fort, puissant et addictif. Le cœur est plus fort que l’esprit. Excellent moment de lecture.
Someone. A. McDermott
J’ai choisi ce roman par hasard; heureux hasard. Alice McDermott nous raconte, ici, la vie ordinaire d’une petite irlandaise de Brooklyn dans les années 30. La lectrice découvre les membres d’une communauté d’immigrés à travers la voix et les yeux bigleux de Marie. De la Grande Dépression à la seconde Guerre Mondiale, la vie de cette femme de classe moyenne se prolonge tout au long du XXème siècle : enfant, épouse puis mère. Si cette fiction offre le portrait d’une femme lumineuse, il faut avouer qu’il est parfois difficile de s’accrocher. La banalité du quotidien, la structure du texte et la chronologie perturbent la lecture. En fait, Alice McDermott souhaite arrêter le temps pour se focaliser sur les bonheurs et malheurs de « quelqu’un » de banal. Loin du roman d’action, il s’agit de découvrir une voix, un style, un langage. Bon moment de lecture.
Coco Chanel A. Albero. I. Sanchez Vegara
Ce petit livre très « girly » plaît aux mamans comme aux enfants. Isabel Sanchez Vegara rend, ici, hommage à Coco Chanel en nous racontant, en rimes, son incroyable destin. Comment la petite Gabrielle Joyeux est-elle devenue une grande styliste parisienne? Extrait d’une collection traduite en 15 langues à travers le monde, ce documentaire est un régal de lecture à voix haute. Les élégantes illustrations d’Ana Albero donnent une touche très tendance à ce joli livre.
Marie Curie F. Isa et I. Sanchez Vegara
Isabel Sanchez Vegara publie une série de documentaires adorables, accessibles aux enfants (dès 5 ans). Chaque livre s’attache à rendre hommage à une femme talentueuse qui a toujours écouté son cœur et ses rêves d’enfant : Anne Franck, Mère Teresa, Frida Khalo… La vie de Marie Curie est, ici, écrite en rimes pour rendre la lecture facile et mélodieuse. Frau Isa, illustratrice et graphiste autrichienne, égaie merveilleusement les pages de ce charmant texte qui pourrait susciter des vocations.
Fugitive parce que reine. V. Huisman
Quand votre mère a envahi votre enfance, il reste des traces indélébiles. Dans ce premier roman autobiographique, Violaine Huisman raconte la difficulté à se construire face à une mère diagnostiquée tardivement « bipolaire ». Danseuse au corps splendide, amoureuse, hystérique, manipulatrice, excessive…Catherine, la mère, a vécu une vie de désillusions. La première partie du roman livre le point de vue d’une petite fille de dix ans, Violaine, enchaînée dans un carcan affectif. La lectrice passe du rire aux larmes en découvrant la vie rocambolesque de cette mère fantasque, débordante d’amour pour ses deux filles. Dans les souvenirs de l’auteure, le mur de Berlin chute au moment où sa mère se fait interner de force à Saint Anne. Violaine devient ensuite narratrice de la vie de sa mère pour raconter son parcours chaotique d’un Paris populaire à la haute bourgeoisie où, même habillée en Saint Laurent, elle ne trouvera jamais sa place. La dernière partie du roman se consacre aux adieux bouleversants à la mère. Comment continuer à aimer une mère qui vous en a fait voir de toutes les couleurs ? L’auteure passe au luminol la vie et les souvenirs de ses parents sans prendre de gants. Elle multiplie les points de vue pour dévoiler la femme cachée derrière le personnage de sa mère. Malgré la violence des événements, Violaine Huisman arrive à prendre du recul pour nous offrir un roman puissant qui évoque la complexité de la maternité et l’inconditionnalité de l’amour filial. Véritable ode à la figure maternelle, ce portrait de femme happe la lectrice dès les premières pages. Le titre fait une subtile référence au personnage d’Albertine dans l’oeuvre de Proust. Excellent moment de lecture. Prix du roman « Marie-Claire » 2018.
Les Rêveurs. I. Carré
L’actrice française, Isabelle Carré, publie un premier roman sincère et bouleversant à propos de son enfance. Née dans une famille foutraque, d’une mère châtelaine dépressive et d’un père désigner efféminé, Isabelle grandit entourée de deux frères. A Paris, l’appartement familial est traversé par un couloir immense comme ses nuits, ses angoisses, ses peurs… un décor de gadgets colorés, de créations artistiques emblématiques des années 70. La blondinette aux longs cheveux commence à livrer des mots dans ses cahiers, vers l’âge de dix ans. Des centaines de mots pour exprimer ses blessures, ses incertitudes, sa sensibilité, ses amours imaginaires…avant de recopier des répliques d’actrice. Le désordre chronologique du récit est à l’image du désordre de sa vie; bousculée. Isabelle Carré nous dévoile sa souffrance comme un secret, la source de son inspiration. Au fil des pages, elle s’interroge à propos du chagrin de sa mère et l’homosexualité de son père. Comment un seul geste peut déterminer plusieurs vies? Il y a dans son écriture, une fraîcheur, une luminosité…une espérance qui rend la lecture, de ce roman autobiographique, particulièrement agréable. Grand Prix RTL/Lire 2018. Grand Prix de l’Héroïne, Madame Figaro 2018. Excellent moment de lecture.
Tant que se dresseront les pierres. M. Dédéyan
Née à Saint-Malo, Marina Dédéyan est l’auteure de la passionnante saga historique « De tempête et d’espoir ». Sa sixième publication nous embarque dans une fresque familiale romanesque du côté de Rennes. En 1942, au moment de la Seconde Guerre mondiale, trois frères bretons sont confrontés à des choix sous le regard d’un père privé de parole : résistance, collaboration….Grâce à un minutieux travail de recherche, Marina Dédéyan retrace les événements au plus près de la vérité et met en lumière la part d’ombre du peuple breton. En puisant dans ses racines russes et arméniennes, cette passionnée d’histoire s’interroge à propos de l’identité bretonne et excelle dans sa manière de décrire cette terre d’embruns qu’elle connaît si bien. Bon moment de lecture.
Yoga Cook Book. G. Bardel
Vous pratiquez le yoga? Comme vous le savez, cette discipline apaise le mental en unissant le corps, le souffle et l’esprit. Mais pourquoi ne pas aller plus loin, dans votre pratique, pour mieux goûter la vie? Garlone Bardel s’est inspirée de textes anciens avant de publier ce livre aux 108 recettes basées sur les principes de l’alimentation yogique, une nourriture riche en prana (l’énergie vitale). Loin des modes fantaisistes, l’auteure allie nos habitudes occidentales, le yoga et l’Ayurvéda pour nous inciter à consommer des ingrédients sattviques : fruits biologiques, légumes biologiques, lait, beurre, céréales, légumineuses, oléagineux, miel, eau, tisane…En collaboration avec une naturopathe, Garlone Bardel envisage des perspectives respectueuses de notre planète : acheter différemment, privilégier les circuits courts et le végétarisme en mangeant local et sain. De l’aube au crépuscule, diverses pratiques de yoga sont présentées avec des recettes faciles, sans viande ni poisson, pour nous offrir de nouvelles opportunités culinaires. Délicieux moment de lecture.
L’enfant perdue. E. Ferrante
Le dernier livre de la saga d’Elena Ferrante est, à mon humble avis, le meilleur. Nous retrouvons Elena et Lila, à la fin des années 70, dans le sud de l’Italie. Elena, la narratrice, vit sa passion pour Nino. Séparée de Pietro, elle déménage à Naples avec ses deux filles où elle poursuit son travail d’écriture. De son côté, Lila monte une société informatique avec Enzo, son compagnon. La vie réunit, finalement, les deux amies dans le quartier de leur enfance. La lectrice se laisse, à nouveau, embarquer dans cette fiction féminine passionnante avec l’histoire politique italienne en toile de fond. Grâce à son style volcanique, sa justesse et son imagination débordante, Elena Ferrante captive au fil des pages. Les deux napolitaines s’aiment, s’entraident, se déchirent, se détestent…pour, progressivement, instaurer un doute chez la lectrice. Le prisme à travers lequel Elena raconte Lila, tout au long de la saga, dévoile une faiblesse : sa jalousie, sa haine, sa crainte et son manque d’assurance, face à son amie, font douter du réel prodige de cette amitié. Toutefois, je vous conseille d’embarquer cette saga dans vos valises, cet été ! Excellent moment de lecture.
Celle qui fuit et celle qui reste. E. Ferrante
Le troisième volume de la saga italienne « L’amie prodigieuse » n’est pas aussi passionnant que les deux livres précédents car il y est surtout question du contexte politique de l’Italie, au début des années 70, d’attentats terroristes et de lutte prolétarienne. Même si beaucoup de critiques saluent la capacité d’Elena Ferrante à mêler l’histoire d’un pays à l’histoire intime, il faut bien avouer que c’est principalement l’intimité des deux amies qui nous intéresse. Nous retrouvons, donc, Elena à la fin de ses brillantes études à Pise. La jeune femme publie son premier roman, inspiré de ses amours de jeunesse, et se prépare à épouser Pietro, un universitaire. De son côté, Lila, jeune maman séparée de Stefano et de Nino, travaille dans une usine de salaison où elle subit du harcèlement. Enzo décide de la prendre sous son aile avec son fils Gennaro. A trois, ils vivent dans un logement médiocre d’un quartier sale et violent de Naples. Elena et Lila se téléphonent sporadiquement mais elles ne se comprennent plus. Secrètement, Elena souhaite parfois la mort de Lila, incapable de surmonter « le vide de sa dérobade ». Même si le roman passionne moins, il n’est pas question d’ennui car rien n’est figé dans cette fiction, à l’image d’une amitié prodigieuse. Tout au long de la lecture, la lectrice s’interroge sur l’identité de celui ou celle qui se cache derrière le pseudonyme d’Elena Ferrante. L’auteure restitue parfaitement un panel d’émotions typiquement féminines liées à la maternité, à la soif de liberté et d’indépendance ou à la passion amoureuse. Elle écrit sans détour, sans concession et dans un langage cru et familier. La justesse des sentiments et des émotions, le style romanesque et l’incroyable diversité des personnages représentent les forces de ce roman addictif. Le mystère Ferrante continue de fasciner autant que sa saga. Bon moment de lecture.
Paradise. M. Cerrone
Il y a quelques années, en croisant Marc Cerrone, j’étais loin d’imaginer son incroyable parcours. Ce roi du disco, fils d’immigrés italiens, tient pourtant du génie. Né sous une bonne étoile, de nature optimiste, entouré par des parents qui l’ont encouragé à oser « rêver grand », l’homme n’a cependant pas toujours eu la belle vie. Du divorce de ses parents au sien en passant par les galères les plus improbables, Cerrone a néanmoins toujours trouvé la force de rebondir. « Right time, right place » comme dit sa maxime préférée, il rencontre à la fin des années soixante le patron du « Club Med », le premier à lui donner sa chance. Après la folie « Club Med » , Cerrone fonde « Kongas », son premier groupe, et part en tournée. Finalement, la vie de ce battant ressemble à des montagnes russes : du paradis à l’enfer en quelques minutes. A travers cette autobiographie rythmée, la lectrice découvre un artiste complet, international, têtu et provocateur. Aujourd’hui, Cerrone se sent « super vivant » et boucle la boucle en recomposant son premier groupe. Les meilleurs DJ de la planète placent ce père de la « French Touch » sur un piédestal et continuent de s’en inspirer. Cette autobiographie, qui paraît le 25 avril 2018, nous replonge avec plaisir et nostalgie dans les années disco et les tubes de ce pionnier de la dance music : « Paradise », « Supernature », « Give me love », « Love in C minor »…Bon moment de lecture.
Madame Pylinska et le secret de Chopin. E-E. Schmitt
Eric-Emmanuel Schmitt est un des auteurs francophones les plus lus et les plus représentés dans le monde, ce qui peut finir par agacer. En ouvrant ce énième roman, la lectrice s’apprête à déchanter. Âgé de vingt ans, Eric se présente chez Madame Pylinska dans l’espoir de se remettre au piano. Subjugué par un souvenir familial et fasciné par Chopin, le jeune homme débute maladroitement son apprentissage. Madame Pylinska va alors lui donner un enseignement musical original : des leçons particulières de vie et d’amour, à la fois poétiques et sensuelles. Ce roman fait partie du « Cycle de l’Invisible », un ensemble de fables, nouvelles et contes de l’auteur sur le thème des spiritualités. Dans ce nouvel opus, Eric-Emmanuel Schmitt nous parle en mélomane passionné et place la musique au-dessus de tous les arts. Virtuose de la plume, cet artiste complet ajoute une note harmonieuse au quotidien en faisant vibrer notre corde sensible. Excellent moment de lecture.
Le nouveau nom. E. Ferrante
Le deuxième tome de la saga d’Elena Ferrante est vraiment passionnant. Elena, la narratrice, raconte sa jeunesse napolitaine en compagnie de Lila, son amie d’enfance, l’épouse de Stefano. Impulsive et instable, Lila décide d’arrêter l’école et travaille à l’épicerie. Sage et réservée, Elena se consacre à ses études et part vivre à Pise. Secrètement, elle rêve d’une histoire d’amour avec Nino. La lectrice se retrouve propulsée à la fin des années soixante, lors d’un été torride et rétro sur l’île d’Ischia. Sous le soleil, les napolitaines passent des vacances trépidantes, pleines de rebondissements. Ce qui rend cette fiction bouleversante, c’est la justesse avec laquelle l’auteure raconte la vie et les sentiments des deux jeunes femmes. Les événements s’enchaînent pour ne jamais laisser place à l’ennui. Finalement, Elena et Lila cherchent, chacune à sa manière, à échapper au déterminisme social de l’époque. La violence quotidienne s’incruste dans la misère. Les flirts, les interdits, les mensonges et les secrets défilent. L’amitié prodigieuse est, cette fois, mise à rude épreuve pour notre grand plaisir de lecture. Bon moment de lecture.
L’amie prodigieuse. E. Ferrante
Si vous souhaitez vous plonger dans une longue saga, voici le premier des quatre tomes publiés par, la mystérieuse auteure italienne, Elena Ferrante. Cette première partie raconte l’amitié entre deux filles napolitaines, de l’enfance à l’adolescence. Elena et Lila sont issues d’un quartier populaire de Naples. C’est d’ailleurs Elena qui est la narratrice de ce roman d’apprentissage, bouleversant de justesse. Elle y raconte son quotidien au sein de sa famille, à l’école et avec ses amis; le temps des premiers émois. Au début des années cinquante, les deux fillettes sont voisines et amies tout en étant différentes l’une de l’autre. Lila est rebelle, malicieuse, farouche, agressive et sauvage. Elena est réservée, intelligente, peureuse et influençable. La diversité des personnages (Fernando Cerullo, Maria Carracci, Madame Oliviero, les frères Solara…) donne une force supplémentaire à cette fiction qui ressemble à un roman autobiographique. La lectrice est frappée par la violence qui fait partie intégrante de la société italienne à cette époque où règne « La Camorra ». Malheureusement, les deux filles côtoient, chaque jour, cette violence dans les familles, chez les voisins, dans la rue et à l’école. Elena Ferrante nous livre, ici, deux portraits de femmes émouvants ; deux femmes unies par une amitié prodigieuse. Bon moment de lecture.
Gratitude. Journal IX. C. Juliet
Le neuvième journal de Charles Juliet couvre la période 2004-2008. La lectrice y découvre les notes et observations d’un homme curieux, soucieux de lutter contre l’oubli et le temps qui passe. Obsédé par la perte de sa mère, alors qu’il était enfant, Charles Juliet partage, ici, d’autres témoignages bouleversants mais aussi des rencontres et de nombreux souvenirs. Lucide, l’écrivain dévoile la part d’ombre de la nature humaine tout en manifestant son empathie et sa compassion. Ce récit autobiographique, dense, nous révèle la personnalité d’un homme humble et sincère qui manifeste sa gratitude pour la vie. Bon moment de lecture.
Les bouées jaunes. S. Toubiana
Dans ce récit poignant, Serge Toubiana témoigne de son chagrin, celui d’un homme qui a perdu la femme de sa vie. Président d’UniFrance et critique de cinéma, il décrit le bonheur d’avoir partagé la vie d’Emmanuèle Bernheim, la romancière française. Dès la première page, l’homme revoit sa femme nager avec vitalité, au large du golfe du Morbihan, longeant la ligne de bouées jaunes. Avec pudeur, il nous raconte leur histoire d’amour, repasse le film du quotidien dans la ville lumière et dans « la maison du bonheur » sur l’île aux Moines. Au cœur de l’intime, un homme nous parle du mystère de la femme aimée mais, aussi, de ses blessures secrètes. Avec une précision excessive, il rapporte les derniers instants d’Emmanuèle comme pour ne rien omettre. Avide de sincérité, Serge Toubiana expose un monde privilégié qui peut agacer. Malgré elle, la lectrice se retrouve dans la chambre 25 de l’hôpital Bichat où défile, désolé, le gratin du cinéma français. Alors, la lectrice referme le livre, les larmes aux yeux, en se souvenant que l’unique richesse est celle d’aimer et d’être aimé. Bon moment de lecture.
L’amour après. M. Loridan-Ivens
A quatre-vingt-neuf ans, Marceline Loridan-Ivens poursuit son oeuvre de mémoire en racontant son retour à la vie après l’enfer des camps. Dans cet essai émouvant, elle s’interroge sur l’amour, le désir et la liberté en compagnie de Judith Perrignon (journaliste et romancière). Marquée par l’empreinte de la mort, Marceline Loridan-Ivens a lutté pour sa dignité après avoir tant souffert aux côtés de Simone Veil et d’autres camarades. Mais quel était le sens du mot « amour » après les camps? En retrouvant une valise pleine de correspondances, Marceline Loridan-Ivens se remémore ses nombreux amants et son grand amour, le réalisateur Joris Ivens. Sans pudeur, elle raconte, ici, son corps blessé, sa sexualité, sa difficulté à être heureuse et à s’abandonner dans les bras d’un homme. Grâce à sa liberté d’esprit et à la culture, cette survivante continue de témoigner et délivre un message d’amour, d’espoir et de liberté. Bon moment de lecture.
Souvenirs de la marée basse. C. Thomas
Une journée réussie pour Chantal Thomas (à ne pas confondre avec la styliste Chantal Thomass !) est une journée de plage. Dans ce joli roman, l’auteure évoque avec grâce les étés des premières sensations, la magie de l’enfance et des rencontres sur le sable. Il est beaucoup question de filiation, de féminité, d’amitié et de liberté dans cet hommage aux rivages d’Arcachon; paradis perdu. Au présent et à la première personne du singulier, Chantal Thomas fait revivre sa famille française et ravive sa relation d’enfant unique avec des parents immatures. Le père disparaît trop tôt. La mère et la fille partagent le culte de l’eau et de l’océan. Dans un style infiniment poétique, Chantal Thomas compose un roman aux multiples tonalités. La petite fille revient à la source, retrace son sillage, sauve de l’oubli une mémoire. Bon moment de lecture.
En camping-car. I. Jablonka
Dans ce livre solaire, Ivan Jablonka raconte des vacances de jeunesse en camping-car, un art de vivre naturiste. A partir d’archives personnelles, l’historien retrace ses longues expéditions estivales à l’image des romans d’aventures de Jules Verne ou de Jack London. Cependant, le Combi Volkswagen représente, ici, bien plus qu’un simple véhicule sorti des usines allemandes après la guerre. Pour l’auteur et sa famille, marquée par la Shoah, cette caravane correspond à la découverte d’un exil propre à l’histoire du peuple juif. A la première personne du singulier, l’auteur sublime ses souvenirs et transforme l’autobiographie en récit collectif ; portrait d’une génération. Au fil des chapitres, la lectrice sillonne les routes de Californie et du sud de l’Europe en compagnie de cette joyeuse bande ; retour vers les décennies 1980-1990. En filigrane, Ivan Jablonka propose une réflexion subtile sur le bonheur et la liberté de notre enfance. Excellent moment de lecture. Prix France Télévisions 2018.
Origines de l’homme, origines d’un homme. Y. Coppens
Yves Coppens est un archéologue français passionné, paléontologue et père de Lucy, célèbre australopithèque (3,2 millions d’années). Au fil des pages de cet essai illustré, le scientifique retrace son parcours en trois parties ; 83 années de recherches : de ses premières expériences sur le littoral breton aux confins du monde. Fasciné dès l’enfance par les tessons de poterie, les os, les fossiles et les Menhirs, ce citoyen du monde fut tour à tour surnommé par les médias « Monsieur Mammouth », « L’homme du Tchad » et « L’homme de l’Omo ». D’ailleurs, la liste de ses titres et de ses fonctions est longue comme l’histoire de l’humanité. Avec curiosité, la lectrice découvre la logistique et l’intendance des sites de fouilles : des transports aux équipements de safari (tentes, couchages…) en passant par la cantine et les petits soucis de santé (malaria, piqûres de scorpion, bave de serpent …).Soucieux de reconstituer l’histoire de l’humanité, et la sienne, Yves Coppens détaille comment, grâce aux fossiles et aux cailloux, il a pu constituer une mémoire qu’il enseigne et transmet. Généreux, Yves Coppens n’oublie pas de rendre hommage à ceux qui ont croisé sa route. Finalement, après avoir admiré la beauté de tant de paysages, le scientifique admet avoir aimé, avant tout, le contact avec les populations locales. A travers ses mémoires et malgré le temps qui passe, Yves Coppens exhume les vestiges du passé tout en gardant intact son émerveillement d’enfant. Bon moment de lecture.