Triste tigre. N. Sinno

Triste tigre par Sinno

En France, 160.000 enfants sont agressés sexuellement, chaque année. Dans 81% des cas, ces violences se déroulent dans le milieu familial. Huit victimes sur dix sont de sexe féminin. Neige Sinno a été violée par son beau père, de l’âge de sept ans à ses quatorze ans. Après un procès où il a été condamné, la jeune femme a rédigé ce bouleversant témoignage. Mais elle prévient d’emblée qu’elle n’est pas sauvée et que son écriture n’est pas thérapeutique. Indispensable, son récit contribue largement à lever le voile sur cet insoutenable tabou de notre société. Au fil des pages, la lectrice découvre une fine analyse du mécanisme des violences sexuelles intrafamiliales. La richesse de ce récit repose notamment sur de nombreuses références littéraires : Nabokov, Toni Morrison Virginie Despentes ou Christine Angot. Le titre fait allusion à l’ouvrage américain « Tiger Tiger » de Margaux Fragoso qui raconte les viols d’une enfant par un pervers. Neige Sinno signe, ici, une confession poignante, intelligente et nécessaire ; une réflexion sur le mal. Excellent moment de lecture. Prix Femina. Prix Goncourt des Lycéens. Prix littéraire du Monde. Prix des Inrockuptibles 23.

La végandelle. L. Bayer

La végandelle par Bayer

Frustrée par le format court des nouvelles, j’ai longtemps préféré lire des romans. Pourtant, après avoir découvert ce recueil, je dois avouer que ces courtes fictions se lisent bel et bien comme un roman. En maîtrisant parfaitement cet exercice de style, Laurent Bayer nous présente une série de personnages et de situations folkloriques. Des caves du palais de justice aux égarements d’Antoine en passant par les soupers de la noblesse belge, l’auteur capte l’attention de la lectrice en la plongeant dans l’univers de sa ville natale, Bruxelles. Inspiré, Laurent Bayer ne manque ni d’imagination ni d’humour. La chute de l’histoire est souvent inattendue et produit son effet. Pour les plus curieux, la signification du titre « la végandelle » se dévoile à la fin de ce recueil de nouvelles qui donne la frite, en ces temps moroses ! Excellent moment de lecture.

Avoir un corps. B. Giraud

Avoir un corps par Giraud

En 2022, Brigitte Giraud a remporté le Prix Goncourt pour son bouleversant récit autobiographique : « Vivre vite ». Curieuse de découvrir un autre livre de cette auteure, j’ai choisi un roman publié en 2013 : « Avoir un corps ». Dans un long monologue, la narratrice décrit son rapport au corps depuis la petite enfance jusqu’à l’âge adulte en passant par l’avortement, la maternité et le deuil. Au plus près de sa vérité, Brigitte Giraud nous décrit les premières fois d’une femme, de la joie à la douleur, en cinq parties. Au fil des pages, il est question d’un corps qui bouge et évolue ; un langage. Avec talent et dans un style pudique et délicat, l’écrivaine retrace cette touchante expérience, à la fois singulière et féminine. Excellent moment de lecture.

Tant que le café est encore chaud. T. Kawaguchi

Tant que le café est encore chaud par Kawaguchi

Le succès de cette fiction « feel-good » interpelle. Pourquoi ce roman est-il dans la liste des best seller internationaux ? Voici le pitch : à Tokyo, il existe un café où il est possible de voyager dans le temps en s’asseyant sur une chaise et en suivant certaines règles. Mais l’opportunité ne dure que « tant que le café est chaud ». Au fil des pages, la lectrice suit l’expérience de quatre femmes japonaises qui, tour à tour, vont s’asseoir sur la fameuse chaise de café. Il faut avouer que le début de la lecture est pénible car les deux premiers témoignages sont futiles, caricaturaux et beaucoup trop longs. En poursuivant la lecture, l’histoire du décès de Kumi et de sa sœur chagrinée se révèle bouleversante. Finalement, ce petit livre fantastique rencontre le succès car il traite de thèmes universels comme la mémoire, l’amour et le pardon au pays du Soleil Levant et de ses traditions singulières. Un roman léger, sage et poétique, à lire au cours d’un voyage ! Bon moment de lecture.