Les bouées jaunes. S. Toubiana

Les bouées jaunes par Toubiana

Dans ce récit poignant, Serge Toubiana témoigne de son chagrin, celui d’un homme qui a perdu la femme de sa vie. Président d’UniFrance et critique de cinéma, il décrit le bonheur d’avoir partagé la vie d’Emmanuèle Bernheim, la romancière française. Dès la première page, l’homme revoit sa femme nager avec vitalité, au large du golfe du Morbihan, longeant la ligne de bouées jaunes. Avec pudeur, il nous raconte leur histoire d’amour, repasse le film du quotidien dans la ville lumière et dans « la maison du bonheur » sur l’île aux Moines. Au cœur de l’intime, un homme nous parle du mystère de la femme aimée mais, aussi, de ses blessures secrètes. Avec une précision excessive, il rapporte les derniers instants d’Emmanuèle comme pour ne rien omettre. Avide de sincérité, Serge Toubiana expose un monde privilégié qui peut agacer. Malgré elle, la lectrice se retrouve dans la chambre 25 de l’hôpital Bichat où défile, désolé, le gratin du cinéma français. Alors, la lectrice referme le livre, les larmes aux yeux, en se souvenant que l’unique richesse est celle d’aimer et d’être aimé. Bon moment de lecture.

 

L’amour après. M. Loridan-Ivens

L'amour après par Loridan-Ivens

A quatre-vingt-neuf ans, Marceline Loridan-Ivens poursuit son oeuvre de mémoire en racontant son retour à la vie après l’enfer des camps. Dans cet essai émouvant, elle s’interroge sur l’amour, le désir et la liberté en compagnie de Judith Perrignon (journaliste et romancière). Marquée par l’empreinte de la mort, Marceline Loridan-Ivens a lutté pour sa dignité après avoir tant souffert aux côtés de Simone Veil et d’autres camarades. Mais quel était le sens du mot « amour » après les camps? En retrouvant une valise pleine de correspondances, Marceline Loridan-Ivens se remémore ses nombreux amants et son grand amour, le réalisateur Joris Ivens. Sans pudeur, elle raconte, ici, son corps blessé, sa sexualité, sa difficulté à être heureuse et à s’abandonner dans les bras d’un homme. Grâce à sa liberté d’esprit et à la culture, cette survivante continue de témoigner et délivre un message d’amour, d’espoir et de liberté. Bon moment de lecture. 

Souvenirs de la marée basse. C. Thomas

Souvenirs de la marée basse

Une journée réussie pour Chantal Thomas (à ne pas confondre avec la styliste Chantal Thomass !) est une journée de plage. Dans ce joli roman, l’auteure évoque avec grâce les étés des premières sensations, la magie de l’enfance et des rencontres sur le sable. Il est beaucoup question de filiation, de féminité, d’amitié et de liberté dans cet hommage aux rivages d’Arcachon; paradis perdu. Au présent et à la première personne du singulier, Chantal Thomas fait revivre sa famille française et ravive sa relation d’enfant unique avec des parents immatures. Le père disparaît trop tôt. La mère et la fille partagent le culte de l’eau et de l’océan. Dans un style infiniment poétique, Chantal Thomas compose un roman aux multiples tonalités. La petite fille revient à la source, retrace son sillage, sauve de l’oubli une mémoire. Bon moment de lecture.

En camping-car. I. Jablonka

Dans ce livre solaire, Ivan Jablonka raconte des vacances de jeunesse en camping-car, un art de vivre naturiste. A partir d’archives personnelles, l’historien retrace ses longues expéditions estivales à l’image des romans d’aventures de Jules Verne ou de Jack London. Cependant, le Combi Volkswagen représente, ici, bien plus qu’un simple véhicule sorti des usines allemandes après la guerre. Pour l’auteur et sa famille, marquée par la Shoah, cette caravane correspond à la découverte d’un exil propre à l’histoire du peuple juif. A la première personne du singulier, l’auteur sublime ses souvenirs et transforme l’autobiographie en récit collectif ; portrait d’une génération. Au fil des chapitres, la lectrice sillonne les routes de Californie et du sud de l’Europe en compagnie de cette joyeuse bande ; retour vers les décennies 1980-1990. En filigrane, Ivan Jablonka propose une réflexion subtile sur le bonheur et la liberté de notre enfance. Excellent moment de lecture. Prix France Télévisions 2018.

Origines de l’homme, origines d’un homme. Y. Coppens

Origines de l'Homme, origines d'un homme

Yves Coppens est un archéologue français passionné, paléontologue et père de Lucy, célèbre australopithèque (3,2 millions d’années). Au fil des pages de cet essai illustré, le scientifique retrace son parcours en trois parties ; 83 années de recherches : de ses premières expériences sur le littoral breton aux confins du monde. Fasciné dès l’enfance par les tessons de poterie, les os, les fossiles et les Menhirs, ce citoyen du monde fut tour à tour surnommé par les médias « Monsieur Mammouth », « L’homme du Tchad » et « L’homme de l’Omo ». D’ailleurs, la liste de ses titres et de ses fonctions est longue comme l’histoire de l’humanité. Avec curiosité, la lectrice découvre la logistique et l’intendance des sites de fouilles : des transports aux équipements de safari (tentes, couchages…) en passant par la cantine et les petits soucis de santé (malaria, piqûres de scorpion, bave de serpent …).Soucieux de reconstituer l’histoire de l’humanité, et la sienne, Yves Coppens détaille comment, grâce aux fossiles et aux cailloux, il a pu constituer une mémoire qu’il enseigne et transmet. Généreux, Yves Coppens n’oublie pas de rendre hommage à ceux qui ont croisé sa route. Finalement, après avoir admiré la beauté de tant de paysages, le scientifique admet avoir aimé, avant tout, le contact avec les populations locales. A travers ses mémoires et malgré le temps qui passe, Yves Coppens exhume les vestiges du passé tout en gardant intact son émerveillement d’enfant. Bon moment de lecture.

Couleurs de l’incendie. P. Lemaitre

Pierre Lemaitre nous offre la suite de son roman « Au revoir là-haut » (Prix Goncourt 2013, Prix Roman France Télévisions 2013…), le deuxième volet d’une trilogie française épatante. Après un succès certain en librairie et l’excellente adaptation au cinéma du premier volet, la lectrice s’empresse de retrouver les personnages de cette fiction géniale. Le roman a le mérite de pouvoir se lire indépendamment mais ce serait vraiment dommage. En effet, Pierre Lemaitre nous entraîne dans une fiction palpitante où il est question de trahison, de vengeance, d’amour et de désillusion. Inspiré par son maître, Alexandre Dumas, l’auteur interpelle ses lecteurs et réserve un défilé de rebondissements ; une vengeance digne du Comte de Monte-Cristo.  Nous retrouvons, donc, Madeleine Péricourt, en février 1927, à l’enterrement de son père. Grande bourgeoise, Madeleine est à la tête de la fortune familiale. Héritière, à une époque où les femmes ont peu de droits, elle élève seule son fils unique, Paul. Malheureusement exposée à la cupidité des hommes, Madeleine est soudainement ruinée et déclassée. Sa vengeance sera sublime, digne des plus grands romans. Grâce au film d’Albert Dupontel, « Au revoir là-haut », le visage de Madeleine s’anime au cours de la lecture sous les traits d’Emilie Dequenne. Paul, personnage éminemment attachant, se révèle sensible et touchant ; Léonce intrigue, Vladi interpelle, Solange étonne…Derrière les mots, la lectrice ressent l’enthousiasme contagieux de Pierre Lemaitre qui, par la maîtrise de son écriture, son ingéniosité et son humour, procure un plaisir de lecture inégalable. Excellent moment de lecture.