La vengeance de Baudelaire. B. Van Laerhoven

Bob Van Laerhoven est un auteur belge très inspiré. Nous voici dans le Paris des années 1870, en pleine guerre avec la Prusse. Le commissaire Lefèvre et l’inspecteur Bouveroux vont, dans ce terrible contexte, enquêter sur une série de meurtres tous porteurs d’indices liés à Baudelaire. Le grand mérite de l’auteur est sa capacité à dépeindre cette époque, si particulière, avec un soucis du détail témoin d’un long travail de documentation. L’atmosphère du roman est, presque, palpable malgré son côté obscur. Orgies, spiritisme, voyeurisme, subterfuges, prostitution, drogues et incarnation du mal bousculent la lectrice tout au long de la lecture. Un certain mystère et quelques personnages tragiques finissent par convaincre. Bon rythme, vrai suspense. La famille et ses secrets réservent bien des surprises. Bon moment de lecture. Prix Hercule Poirot.

Le Cercle. B. Minier

Un polar français épais, doté d’un vrai suspense. Une histoire riche, compliquée, glauque, où nombre de personnages s’entrecroisent. Juin 2010, Martin Servaz (policier) reçoit un e-mail énigmatique pendant que Claire Diemar est sauvagement assassinée à Marsac. L’enquête va alors débuter, pleine de rebondissements, prenante. Bernard Minier présente ses chapitres tels des scénarios (scénarii) en mettant en scène ses personnages dans un style caractéristique du polar. On peut d’ailleurs se demander si un polar, comme celui -ci, doit obligatoirement être écrit dans un style cru, familier et grossier? L’abondance des thèmes impressionne et implique certaines longueurs dans le texte: désir, amour, dépression, mensonge, trahison, littérature, homosexualité, viol, drogue, musique, politique, maladie, accident etc… La lectrice va, peu à peu, s’approcher du « Cercle » grâce à une quantité d’indices et d’éléments distillés par l’auteur. Lorsque Martin Servaz renoue avec son ex, qui n’est autre que la mère du principal suspect, l’affaire se complique. Moment de lecture mouvementé. Sélection Grand Prix des Lectrices du « Elle » 2013.

Blanche-Neige doit mourir. N. Neuhaus

Ce polar, traduit de l’allemand, est riche comme un bavarois. Dans le village d’Altenhain, en novembre 2008, Pia Kirchoff et Oliver Bodenstein mènent l’enquête après une tentative de meurtre sur une femme. A partir de ce fait, une avalanche d’évènements va se produire en cascade, formant une intrigue particulièrement riche en rebondissements. Nele Neuhaus nous entraîne dans une histoire très mouvementée qui trouve son origine dans les meurtres de deux jeunes filles du village en 1997.Tobias Sartorius a été accusé de ces meurtres et a purgé sa peine de prison avant de revenir au village et provoquer la colère de certains habitants. Suspense assuré dans ce polar de 400 pages où l’auteur décrit consciencieusement l’atmosphère étouffante de ce bourg maudit. Si ce polar a remporté un vrai succès outre-Rhin c’est certainement grâce à son caractère identitaire. L’auteure nous parle de l’Allemagne d’aujourd’hui et, en toile de fond, de ses problèmes de société. Les thèmes abordés sont nombreux mais retenons ceux du crime, de la dérive du couple, du mensonge, de la responsabilité, de l’autisme et du désir. Beaucoup de personnages y sont méticuleusement décrits. Certains comme Bodenstein, Pia, Amélie ou Thiers sont attachants tandis que d’autres sont énigmatiques voir versatiles comme Nadja, Claudius Terlinden ou Daniela Lauerbach. Tous les ingrédients d’un bon policier sont rassemblés. Cependant, la lectrice déplore un enchaînement d’évènements trop important rendant la lecture presque indigeste malgré une maîtrise certaine du style. Bon moment de lecture trépidante. Sélection Grand Prix des Lectrices du « Elle » 2013.

Plaintes. I. Rankin

L’action se passe en Ecosse, dans la région d’Edimbourg, en février 2009. Ian Rankin nous entraîne dans une affaire interne de police en prenant son temps pour déballer tous les éléments de l’enquête. Un polar soft avec une petite dose d’action et une bonne dose de violence et d’espionnage. Une affaire de ripoux dont Malcom Fox, enquêteur au Service des Affaires et Plaintes internes, est le principal personnage et le nouvel héros de Rankin. Lorsque le corps, sans vie, de son beau-frère est retrouvé sur un chantier, les mondes personnel et professionnel de Fox vont s’entrechoquer. La ville est très présente tout au long du polar. L’auteur fait un travail de topographe et se sert d’immeubles et de lieux comme repères. En toile de fond, Ian Rankin aborde, ici, les thèmes de crises économique et immobilière mais aussi de violence conjugale et d’alcoolisme. Les femmes ne sont pas très présentes dans ce monde d’hommes et sont présentées comme des personnages qui subissent. Beaucoup de dialogues dans ce policier à suspense de 475 pages. Bonne traduction. Sélection Grand Prix des Lectrices du « Elle » 2013.

Les Apparences.G. Flynn

les apparences

La société américaine est composée de diverses catégories de personnes dont énormément de puritains. Gillian Flynn ne fait absolument pas partie de cette catégorie. Son style est pour le moins brut et salace. Au début de la lecture, ce policier a pourtant toutes les « apparences » d’un bon thriller. En effet, Gillian Flynn joue avec nos nerfs et jongle avec un vrai suspense, il faut le reconnaître. L’idée de départ est bonne et certains chapitres captivent vraiment. Cependant, l’intrigue est beaucoup trop machiavélique et l’histoire définitivement abracadabrantesque. Trop de longueurs dans ce policier, à deux voix, qui ne supporte pas la traduction. L’auteure nous parle avant tout du mensonge et de la désintégration du couple. La fin est à la hauteur du livre: peu convaincante. Grand Prix des Lectrices du « Elle » 2013.

Tais-toi et meurs. A. Mabanckou

MABANCKOU-2012

Alain Mabanckou nous plonge dans un polar écrit avec une maîtrise incroyable. Son univers d’immigré congolais naïf, installé à Paris avec de faux papiers, n’appartient qu’à lui. La lectrice se laisse balader dans cette intrigue géniale où il est question d’identité, d’origine, de croyances, de dimension culturelle, de sexe et de combines. Julien Makambo est le narrateur de cette histoire qu’il écrit depuis sa prison de Fresnes. Beaucoup de personnages caricaturaux y évoluent pour notre plus grand plaisir de lectrice: Prosper le Nordiste, Désiré le musicien, Bonaventure le premier agent immobilier parisien noir, Willy le mécanicien, Pedro le fausseur et mentor etc… Ce n’est pas le suspense qui nous tient mais bien le style de l’auteur que nous connaissons déjà. Alain Mabanckou écrit de manière percutante, sans rien masquer. Il n’est pas dupe de notre société et la dépeint, encore une fois, avec humour, cynisme et un réalisme déconcertant. Lui seul raconte le Paris « africain » avec autant d’exotisme. Très bon moment de lecture.

Des ombres dans la rue. S. Hill

couverture

Un roman policier épais qui laisse perplexe. Bonne traduction, ce qui n’est pas négligeable, mais le livre comprend trop de digressions. Nous suivons l’enquête de Simon Serailler dans la ville de Lafferton en Grande Bretagne. Entre les prostituées étranglées et d’autres femmes disparues, des pistes menant à des impasses et une ville qui vit dans la peur, la lectrice se sent parfois découragée. Le suspens tient pourtant en haleine et c’est là le vrai talent de Susan Hill. Cependant, elle donne une vision bourgeoise de la société anglaise avec d’une part les pauvres prostituées (le mal) et d’un autre côté les notables (le bien). Son style est direct, dramatique avec beaucoup de descriptions. Quant au titre « des ombres dans la rue » il fonctionne en anglais mais se retrouve dénué de son côté mystérieux en français. Sélection Prix des Lectrices du « Elle » 2013.

Au lieu-dit Noir-Etang…T.H.Cook

Voici un vrai polar. Août 1926, en Nouvelle-Angleterre dans la ville de Chatham. Henry Griswald, le narrateur, nous conte l’histoire de son adolescence, de sa vie étriquée à Chatham School, l’école dirigée par son père. Arrive un nouveau professeur, Mlle Channing, qui va tout bouleverser sur son passage. Il est question ici de passion secrète, d’adultère, de mensonges et de morts. Henry va découvrir la vie sous un autre angle, complice muet de ce professeur si désirable. Les faits sont lentement distillés parallèlement à la retranscription du procès; un procédé captivant. Mais ce qui séduit ici, c’est le climat que Thomas H. Cook installe en posant délicatement sur sa toîle des couleurs, des tons, des impressions et de multiples références. La description des paysages, notamment, révèle une indéniable intensité, une violence sournoise. La psychologie des personnages est particulièrement soignée. L’atmosphère de ce livre est finalement presque palpable et c’est ce qui le place en haut de la pile. Ecriture poétique; style noir, romantique et tourmenté. Excellent suspense. Sélection prix des lectrices du « Elle » 2013.

Paraphilia. S. Desforges

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Il y a plusieurs sortes de policiers et celui-ci est à placer dans la catégorie « très dérangeant ». Le thème principal, comme l’indique le titre, est la paraphilie càd les comportements sexuels déviants. Oncle Tom souffre de pédophilie. Une chasse à l’homme est ouverte. Le coupable est-il le bon? Si vous êtes parent, comme moi, le livre est évidemment perturbant. Cependant, je remercie Gilles Paris de me l’avoir envoyé car voici un policier différent des autres. « Paraphilia » est le fruit d’un travail à quatre mains, un duo d’auteurs anglais. Ne trouvant pas d’éditeur en Angleterre, ils ont publié eux mêmes, en version électronique, ce policier. Après trois mois, cent cinquante milles exemplaires ont été vendus. C’est un vrai document qui retrace l’évolution de la pédophilie dans notre société et qui se base sur des faits réels. Lecture intense, vrai suspense.