C’est avec un certain retard, et une appréhension certaine, que j’ai, enfin, lu le prix Goncourt 2012. Inspiré de l’homélie de St Augustin, figure tutélaire du livre, Jérôme Ferrari examine à plusieurs échelles ce qui constitue un monde. Il nous présente ses personnages corses dans le tumulte des guerres du 20ème siècle jusqu’à nos jours. Matthieu, fils de Marcel, va finalement abandonner ses études prometteuses pour reprendre le bar de son village natal qu’il idéalise. Libéro va, lui aussi, s’associer à Matthieu pour bâtir ensemble ce qu’ils pensent être le meilleur des mondes. Leur ambition est si profonde et leurs attentes si fortes qu’ils vont finir par s’éloigner l’un de l’autre et se heurter à un monde réel incapable de les combler. Jérôme Ferrari emploie une dimension mystique pour nous évoquer le rapport des hommes au monde dans un style profond et puissant. Son caractère défaitiste n’emporte pas tous les suffrages et, pourtant, il s’agit bien d’un remarquable roman. Référence au philosophe Leibniz et son enseignement sur la cohérence du monde. Ce roman est un monde possible.